SAMEDI 27 avril 2024
de 14h00 à 19h00

dans le cadre du Nouveau cycle
"Techniques fécondes, tonique faconde"

Animation : Régis MOULU

Thème : Rythmer son écrit à l'instar des plus belles mélodies

Les comédiens ont tendance à dire que les textes se respirent, c'est-à-dire que leur musique propre habiterait d'elle-même nos poumons. Il y aurait alors comme un naturel à jouer/lire un texte, une justesse à le porter qui dépendrait en somme de sa ponctuation, de ses syllabes, de ses sons et de ses unités thématiques principalement. C'est ce "facile-en-bouche" que nous avons approché en priorité comme si "écrire" est déjà "entendre dire", et ce, d'autant plus que l'oralité est une qualité recherchée en littérature.

Remarque : au-delà de la contrainte formelle (thème), le sujet suivant a été énoncé en début de séance (au choix) :

Sujet 1 : Choisir un lieu qui aura une incidence, à un moment choisi, sur le rythme de votre texte. Autrement dit c'est le décor, les caractéristiques d'un paysage, ses matériaux et/ou sa température, etc. qui influenceront votre façon d'écrire, la longueur de vos phrases, le choix de vos mots davantage vécus/incarnés/exultés que pensés.
Par exemple quand Jules Michelet parle de la Champagne en ces termes « par les plaines plates de la Champagne s'en vont nonchalamment le fleuve des Pays-Bas, le fleuve de la France, la Meuse, et la Seine avec la Marne son acolyte. Ils vont, mais grossissant, pour arriver avec plus de dignité à la mer », on dirait que sa phrase ressemble  elle-même à l'aspect aplani et étendu de la Champagne.
Sujet 2 : Se mettre un air/une musique en tête (ou l'écouter au casque si c'est possible) et écrire en étant conditionné par lui/elle.
Pour stimuler et renforcer l'écriture et les idées de chacun, un support présentant tout ce qui joue sur un rythme d'écriture (loudeurs, oralité, suspense, effet de transe...) a été distribué en ouverture de session.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ci-après quelques textes produits durant la séance, notamment (dans l'ordre):


- "Rentrée des classes" & "Promenade" de Nadine CHEVALLIER

- "Au rythme du temps qui passe" de Christiane FAURIE

- "700 grammes de crevettes roses" de Régis MOULU

- "Girls! & a boy" de Claudine CARPENTER

 

 

"Rentrée des classes" & "Promenade" de Nadine CHEVALLIER


RENTREE DES CLASSES


Un baiser sur ma joue,
J'ouvre les bras
et le voilà parti
si petit, si petit
dans ce long couloir si long, si long dont je ne vois pas le bout.
Il se retourne enfin.
Me sourit. Me sourit !
Et mon ceour tout soudain
Mon coeur …

Le petit sac sur son dos
se balance, se balance
au rythme de son pas
si rapide, si rapide.
Gambadant et joyeux
il avance, il avance.
Et mon cœur tout soudain
Mon cœur …

Avec lui plein d'enfants
dans ce couloir si long, si long dont je ne vois pas le bout.
Ceux qui crient,
ceux qui pleurent,
qui tapent du pied,
qui s'accrochent.
Je ne vois que lui.
Et mon cœur tout soudain
Mon cœur …

Parmi tous ces enfants
lui qui marche serein,
s'en va sautillant
de son pas si rapide, si rapide.
Et mon cœur se brise
Mais voilà que soudain
il se retourne, son pas se fait course
il est là dans mes bras qui le bercent
Maman !

Un baiser sur ma joue
J'ouvre les bras
et le voilà parti

Alors je pars moi aussi
Loin de ce couloir si long, si long, dont je ne veux pas voir le bout.



PROMENADE


Il était une fois une forêt enchantée où je suis allée me promener parmi les bruyères et les buissons de ronces.
Des chemins creux s'y entrecroisent à en perdre le nord.

J'ai marché tranquillement, observant les plantes parmi les tapis de mousses gorgés d'eau des dernières pluies. Aucun rayon de soleil ne filtrait à travers les épaisses nuées grises.
Les feuilles des jacinthes pointaient à travers l'humus dans les creux des vallons.

Les rochers mouillés, les arbres tordus, les sentiers tortueux, les branches tordues, les rochers moussus, les arbres dressés, les sentiers tapissés d'aiguilles de pins.

J'ai marché, j'ai couru.

Branches tombées, feuilles pourrissantes, mousses mouillées, rochers animaux, branches aux doigts griffus, sentiers labyrinthes …

Je me suis perdue.



"Au rythme du temps qui passe" de Christiane FAURIE


Pourquoi sortir par un temps pareil ?
Ilse dirige lourdement vers le fonds du couloir étroit et sombre qui mène au porte-manteau chargé de lourds parkas informes, incolores, élimés et colmatés par du chatterton suintant.
Il en choisit un, j'imagine au hasard, le plus accessible. Mais peut-être au contraire, de manière très intentionnelle en écho au ciel chargé de lourdes traînées de brume cotonneuse.
Allez savoir !
Son front est  si bas, ses yeux mi-clos, le visage de tant de tracas.
À l'intérieur, tous les murs transpirent de tant de non-dits.
Les chaises s'enfoncent silencieusement dans le parquet aux joints béants et criblés de tâches rebelles.
La table, tronc jadis vaillant de la forêt voisine, s'allonge en lassitude de n'avoir pas respiré l'humus  à ses pieds depuis tant de siècles.
J'entends son pas lourd, tambourinant sur le sol dur qui grogne tel l'ours dérangé dans sa tanière.
La porte grince pour signifier son désaccord. Elle  peine à s'ouvrir et s'exécute à regret en poussant un cri aigu transperçant la nuit.
Comme pour détendre l'atmosphère, le chat roux me regarde de ses yeux verts avec une pointe d'ironie.
Il entame une sarabande, sautant d'une chaise à l'autre et sur la table en emportant une tasse dans un fracas me sortant de ma léthargie. Je le suis alors dans cette danse joyeuse.
Il est comme l'archer du violon entre mes jambes et me dirige vers le piano ouvert.
Oserais-je quelques notes ? Je m'y hasarde et il me suit, appuyant ses pattes agiles sur les touches en écho à mes doigts.
Va t'il apparaître avant que le désordre ne se soit dissipé ? Soudain l'angoisse m'envahit.
Que fait-il ? Une lueur au loin. Serait-ce lui ? Il ne m'a rien dit.
Il m'a laissé entrer après un si long voyage à la recherche de quoi au juste ?
Pourquoi ne m'a t'il pas questionné ?
J'aurais tant à dire pour soulager mon âme et il comme embarrassé par tous ces mots au bord des lèvres.
Je me réchauffe devant l'âtre souriant de toutes ses grandes dents jaunies dans sa grande bouche béante.
Le chat se love confiant sur mes genoux. Je l'interroge du regard sur ce qu'il sait de son maître.
Il me dévisage en clignant de ses yeux goguenards, je perçois un léger haussement d'épaules moqueur.
Puis me  montre son désintérêt en sautant sur une araignée nichée à l'angle de la cheminée.
J'assiste alors médusée au combat livré. C'est l'araignée qui remporta le match en se réfugiant dans une des multiples failles des murs, laissant le chat tout penaud de cet échec devant témoin.
Je le caresse compatissante. Un nuage de poussière emplit l'air et retombe à nouveau sur le sol comme si elle n'avait d'autre choix.
Chaque chose à sa place dans cette demeure où rien ni personne ne s'autorise à changer.
La lueur  au loin danse et se tord en un serpentin géant. Elle perce la brume et semble vouloir rivaliser avec l'éclat de la lune.
C'est un combat perdu d'avance. La reine, sur son piédestal le snobe.
Je le vois la contempler et s'agenouiller en signe d'allégeance, ses cheveux illuminés de gouttes phosphorescentes.
Soudain, il se relève, puissant, le torse ouvert,  son pas  est vif, sa force incommensurable.
Il court à travers les bois ; cueille de-ci de-là tel un feu follet, des baies, des perles de rosée.
Le chat vient aux nouvelles et scrute l'horizon en sautillant. Il a tout compris et l'attend.
Moi aussi j'aimerais communier avec lui. Le chat m'intime l'ordre de ne pas bouger de son regard perçant, une patte en avant.
Son retour est proche.
Il va enfin me regarder et nous allons recommencer.

 

 

"700 grammes de crevettes soses" de Régis MOULU, animateur de l'atelier


Il venait de partir, oh !
Elle voulait le retenir, ah !
Il venait de partir, oh oh oh !
Elle courait jusqu'au quai
où il venait d'embarquer
avec toute sa vie
dans son gros sac à dos, oh.

Et elle courait de plus en plus vite,
plus vite, plus vite, plus vite,
accéléra encore et encore le pas,
allongea les foulées
jusqu'au point où elle perdit chaussure et allure,

malmené, cassé, éjecté fut son petit soulier
marron et verni,
mais elle continua à se hâter,
son pied blanc et chaud
se grisant de plus en plus de saletés,
déjections de pigeons et autres liqueurs de la ville.

C'est à cloche-pied qu'elle débouqua sur le port,
attifée d'une robe fripée comme des tripes,
jaunie de sueurs, débraillée, défaite
mais encore toute fiévreuse d'espoir,
le cœur gros comme son amour pour lui,
un cœur en forme d'oiseau.

Vu d'où elle était, le bateau n'était plus qu'un petit point noir,
un grain de poivre
qui flottait sur la ligne d'horizon.

Elle toussa, pleura, cria, ameuta nombre de regards.
Cette femme est malheureuse,
son palpitant se déchire,
elle regretta éperdument
de ne pas lui avoir dit, avant,
qu'elle l'aimait.

Elle sentit en elle une fenêtre qui se refermait,
volets inclus.
Absence de lumière.
L'obscurité pour seul compagnon.
Elle pressa sa médaille de baptême,
à cette occasion, éprouva la sensation
que la peau de ses doigts
était morte comme de l'étoupe.

La piscine de ses pupilles déborda
comme crève le jaune d'un œuf au plat.
Crut se vider de son sang
« en monnaie de larmes ».
Se trouva fort bête
lorsqu'elle entrevit l'attroupement
qu'elle avait causé.
C'était jour de marché.
Des étals environnants se détacha un poissonnier,
puis une main de poissonnier
tenant un sachet rond comme un ballon :
700 grammes de crevettes roses
qu'elle accepta mécaniquement.

Commença pour elle le bagne de la souffrance
et sin chemin de croix,
celui du retour à la maison,
ce domicile où elle se retrouverait en face d'elle-même,
elle-même avec son chagrin, ses désillusions, ses regrets, sa remise en cause totale et sèche.
La longue transformation en pierre.

Elle mangea une crevette,
sans doute inconsciemment
pour que la forte odeur de poisson cesse,
tant cela faisait déjà 7h00
qu'elle était entrée et assise
à sa table de cuisine.
La saveur prononcée du crustacé
ne la fit pas voyager
comme à l'habitude.
Pire, la crevette provenait peut-être de l'endroit
où son prétendu était en ce moment même.

Un chat à la fenêtre démarra son spectacle.
Un « chat-trois couleurs » dont la danse
avait la souplesse d'une voile dans le vent.
Elle se leva
et s'aperçut qu'elle n'avait qu'une chaussure,
se lava un pied,
boucha son évier,
ne s'en soucia pas plus que cela.
L'eau stationnant dans la cuve
lui imposa son propre reflet :
un visage plat et rongé par un tas de saletés en suspension.
À présent un lion griffait franchement
le montant de la fenêtre
avec un miaulement de percepteur d'impôts.
En boule de désirs inassouvis,
il sortait même les griffes,
la femme prit peur,
se blottit sous la table,
dans l'empressement emporta avec elle
son tiroir qui explosa
en nuage de fourchettes et couteaux,
et cuillères.
Un décapsuleur aussi, éplucheur, écumoire et couperet.
Singulière constellation.

Au sol, le carrelage froid
sur lequel elle était maintenant assise
la rétracta.
Il lui sembla qu'elle devint folle.
Aussi se vit-elle rapidement ailleurs,
comme trimballée par ses pensées.

Frénétiquement, elle se surprit en train de ranger sa chambre à coucher
comme une furie,
commençant par son armoire :
tout son contenu finit alors à la poubelle.
Pareille pour la commode
où parmi les objets y figurait
un cadre comportant la photo de mariage de ses grands-parents défunts
qui, lui exclusivement, la freina un temps,
un temps seulement.
On aurait dit qu'elle vidait sa masure.
Et c'est ce qu'elle fit.
Et qu'au bout du compte, elle partirait ailleurs.

Devant la petite maison creuse,
une calèche attendait.
Avec deux beaux chevaux noirs.
Elle remonta ses cheveux en chignon
à la manière d'un gros coquillage,
franchit la porte,
je ta la clef au hasard du jardinet
et monta dans la voiture sans cochet.
Le fiacre s'élança.

Très vite le paysage qui défilait sous ses yeux
composa des lignes d'écritures,
des phrases, un chapitre, un livre, des livres et des kilomètres d'idées.

Ce fut comme si ces visions se déposaient
en cristaux solides
dans la grotte de son cerveau.
Belle géode.

Par un modeste hublot,
elle profita des deux croupes chevalines
qu'un galop soutenu
faisait monter et descendre
tels des pistons d'un moteur à deux temps,
hypnose assurée,
au point où elles se muèrent rapidement
en deux mains de pianiste,
deux mâchoires qui croquaient la route à pleine vitesse,
deux gueules d'ogres.

L'équipage s'arrêta devant un relais en ruine.
Là se tenait le bal des plantes vertes
dans lesquelles elle s'immergea.

Les secours la trouvèrent recroquevillée
sur le carrelage de sa cuisine.
Pas même la fracture, avec bris de vitre, de la fenêtre
la fit sortir de ses pensées.

Aujourd'hui à l'asile, aucune de ses paroles échangées
n'est porteuse de mémoire.
Elle reste pourtant calme.
Elle est comme calme et pleine d'on ne sait quoi.
Sur les plannings d'occupation des chambres,

elle figure avec la mention « durée illimitée ».

 

"Girls ! & a boy" de Claudine CARPENTER, texte écrit en anglais et lu-traduit à l'oral en français lors de la séance


When I arrived at that small Scottish town for university, I was like a bat, terrified, with my dark wings (in those days they took the form of a black woollen coat) wrapped around me tightly for protection, my eyes peeked out from the top of a dark scarf that was wound up to the very top of my nose. I looked at everything around me avidly but quickly dove back under my wings whenever someone paid too much attention to me, sometimes baring my small sharp teeth if they persisted. However, University taught this young bat many things, few of which were learnt In the lecture hall. Firstly, friends. I met A and B in hall shortly after Fresher's week and we became inseparable in a matter of days, sitting together for meals and chatting, sitting in one another's rooms with mugs of hot tea and chatting, sitting in the library to study together and hardly chatting at all. In second year, we decided to share a house together and our chats moved to the two barred electric radiator in the living room as it was the only reliable source of heating in the tiny seaside cottage we had rented. There, huddled under blankets and drinking what now seems like bottomless cups of tea in the semi-darkness, we talked until the late hours of the night about books, about politics and Tony Blair's rise in the Labour Party, about Allende, Pinochet, Chile and magical realism, about Franco and what influence his dictatorship and its end had had on Pedro Almodovar's films. I opened my bat wings for them, first a crack and then more widely as I learned to trust them, and our conversations haltingly moved on to our childhoods and teen years. With them, I learned that I was likeable, and that the world, even in this cold Scottish seaside town, was not as harsh as I had been led to believe and that I could open my wings and show my face to others. And then, I met Her. One of Her English literature modules had aroused her curiosity about Latin American literature and it so happens that I was available and delighted to show her around the shelves of the Spanish department library. Her build was slight but Her smile was huge, Her green eyes sparkled behind a pair of metal rimmed glasses and I couldn't help but engage in a conversation with her. Her major was (her Honours were) English Language and Literature and her minor was (because it was actually Joint Honours) in the Classics. Her curiosity, quick wits, long dark hair worn in a plat and her (only semi-) ironic blue stockings were enough to make me realise she was my kind of person and to invite her for a coffee. I spent the coffee gazing at Her dimples, Her wrists and Her adorable hands and was awed by the extent of her literary culture and her passion for books. My heart was beating so hard that my wings fell wide open for Her and I was head over heels in love in a matter of hours. The next few months were spent in a blissful and literary blur. Unfortunately, Her Ivy League College's degree program only had one semester in Scotland, and our paths parted on a cold tearful January morning at Edinburgh airport. After a short mourning period, we got back in touch, using a new technology called email to write to each other. I saw how Her love of books and all things literary led Her to a career in publishing, working for (what was at first) a small publisher specialising in feminist writers. It started selling books like hot cakes after Me Too. With Her, I learned that I could be loved, I learned to open my wings wide to receive this love and to give love back. Unfortunately, I also learned that love when it is taken away causes a pain that must be similar to losing a limb. I was a wreck. The pain floored me, regularly engulfed me and I swore that never again would I let myself be burned so hard. Luckily, She bumped into me in a pub, in the first week of third year. She was tall and athletic and blonde. She was originally from Amsterdam and had come to my small university to pursue a PHD in biochemistry although she wasn't sure that she didn't want to switch to pyrotechnics. As she used to say, she didn't know if she would rather use chemical products to melt things down or blow them up. She cycled everywhere before it was fashionable to do so, as she was from a very flat country she got very excited about the Scottish hills and insisted that we go on long hill walks which made me sweat pints despite the freezing wind. She was quick witted, a voluble talker and an amusing one at that, and she often had me laughing until my ribs hurt. Our time together, was happy, fast paced and often hilarious. However, it all came to an end when I realised that She was carrying out biochemistry experiments in the digs She was renting, under her bed, in six half-eaten cereal bowls. The bowls were removed and sterilised by yours truly and all could have been forgiven. It was only when I found three more beneath her sitting room table that I decided that enough was enough and that She was no longer relationship material and that She would be kept in the friend zone. She went on to have a brilliant career in biosciences. She specialises in fungi and mould and actually recently won an award for a new biomaterial that harnesses the powers of a tiny mushrooms and uses them to turn waste and into construction materials. She taught me to open my wings just enough let some love in and to give enough back but to always keep the deepest darkest and most sensitive parts well protected from pain. Then came the eco activist who was quickly replaced by the human rights defender who dumped me for the thespian whom I stole away from her in retaliation. I also dated a show jumper, a divinity student (yes… there are gay divines, would you believe it? We had a hellishly fun time together), the daughter of a city investment fund banker (she left me when she realised that my family house in France was in Normandy and not the Cote d'Azur), a computer scientist (who taught me how to download films on my computer using E-mule), and a DJ with whom I bopped to "Boys and Girls" and who gave me the soundtrack to that period of my life. (There was also a brief fling with Them which was quite an experience) They all taught me that my dark wings, if polished to perfection, would reflect what they most loved about themselves. They taught me that I could be charming, bright and amusing and that I could have a nice time if I stepped into the light and kept the dark painful bits pushed down in my heart for safe keeping. My relationship with Them had made me realise that I had to take a boyfriend home at some point. Maman had been badgering me about meeting someone nice for a while now. As she said "Your friends are all going to get married and forget you and you, you are going to end up all alone in a house with five cats". That perspective worried me far less than it did her but I realised that she needed some reassurance. Luckily, this was the point where I met Alistair. Alistair was perfect. He was tall, his sandy hair flopped curlily onto his forehead and occasionally fell into his eyes. He was gangly like so many upper British upper class boys are at that age and he owned an enviable collection of tweed jackets and corduroy trousers. He had been schooled in Fettes College. His manners were impeccable. He was kind, considerate, intelligent, sensitive and he had a terrible taste in men that often left him heart broken and sobbing on my bed. The rumours about the British Upper class and their openness on the topic of homosexuality are, despite the general misconception, only rumours. His family was Church of Scotland through and through and wouldn't have accepted his deviances any more than mine would. We thus decided that, for appearance's sake, we ought to hitch our wagons together for a while. I hit it off with his family right away. Mother was delighted at the idea of bringing a French element into the family and was constantly asking me for traditional French recipes (may Maman forgive me, when I begged her to give me her tarte tatin recipe, it was to give it to Mother, not to make it myself). Father told me all about the Auld Alliance and he loved that I knew my way around a horse and dogs. My many eccentricities were put down to my French origins and honestly, any member of that family would have been treading on very perilous terrain if they had criticised me for my occasional unconventionalities. It went well with my parents, Maman loved that he was a peer (he was the third son of a Baron and was never going to inherit the family title or even the family pile but a peer nonetheless) and that he knew his Monet from his Manets. Daddy was a little more circumspect, because he found him rather soft and he was rather concerned at Alistair's tendency to go out to formal events in a skirt (the skirt was a kilt in the Macpherson tartan but a skirt nonetheless) but he agreed that he was a nice chap and he was tall which was good. My brother called him "a fucking arse bandit and poofter". We had honed our act well enough and I am certain that he suspected absolutely nothing… it was just that any man capable of loving me had to be a faggot. Our relationship lasted several years. After graduation, we moved to Paris together and bought a small two bedroom flat in the Marais. We had separate rooms and only slept in the same bed when family came over. We used a bolster nicknamed "La Dueña" as a chaperone for those occasions. He cooked, I pretended to clean and made sure that the bookshelves were always well stocked. He landed his dream job in an antique gallery, I taught English and started thinking about what I really wanted to do with my life. I had thought it would last forever with Alistair, that I had found the man for me. Obviously, our relationship was not exclusive, that would just have been weird. There were many "Mister Wrongs" and "Miss-not-quite-rights" and many late night discussions about them. But it just felt right. One day, however I got up and went to the kitchen and found Alistair and Sasha having breakfast together. Sasha was Russian, from Kaliningrad, he was beautiful and sweet and kind. When I saw them on that fateful day, when I saw how Sasha was looking at Alistair, and how Alistair was looking at Sasha, I understood this essential fact: our beautiful friendship was just friendship despite its beauty and that that was good. And slowly, as if I were unclenching a fist, I unfurled my wings. Supported by my memories and protected by the love of my friends, I decided to fly.

Les textes présentés ci-dessus sont sous la responsabilité de leur auteur. Ils sont quasiment le fruit brut qui a été cueilli en fin de séance... sans filet !
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