SAMEDI 4 novembre 2006
de 14h00 à 19h00

dans le cadre du cycle
" L'espérance des expériences "

Animation : Régis MOULU

Thème :
Récits de groupe (écriture à plusieurs mains)


Des feuilles circulent. Chacun inaugure la sienne avec un titre et une première phrase. Au bout d'un certain temps, le même pour tout le monde, toutes les feuilles changent de main afin que le récit commencé puisse se poursuivre, et ainsi de suite…

Cette technique ludique nous permet :
- de travailler l'efficacité (être explicite et précis) ;
- de réfléchir sur le sens narratif que prend un récit, sur la force que peut avoir un "coup de théâtre", ou encore sur tout l'univers que peut charrier un mot…
- de découvrir des points de vue singuliers et des associations d'idées sur le thème qu'on a initié.

A la fin, chacun a lu la feuille qu'il a inaugurée, dans la folie d'avoir pu constater que "l'interaction collective" a été porteuse.

Pour stimuler et renforcer l'écriture, des documents ont été remis lors de la séance afin que chacun ait matière à s'exprimer (notamment consignes et idées pour dynamiser un récit) !


Ci-après quelques textes produits durant la séance.
Chacun d'entre eux a été écrit par l'ensemble des partcipants. Il portera néanmoins le nom de l'auteur qui en a choisi le thème et la forme, qui l'a initié par une première phrase et l'a clos par une dernière et ce, avant de lui attacher son titre.
Les participants de cette séance sont ARGOPHILHEIN, Marie-Odile GUIGNON, Catherine BECQUAERT, Angeline LAUNAY, Cécile LE VAILLANT, Françoise MORILLON, Janine NOWAK, Aurélie BOCCARA, Séverine CHAISE, Anne-Marie PETTRé, Rémi DANO, Janine BERNARD et Régis MOULU.


Sont à ce jour consultables (dans l'ordre):

- "Vie de bottes" de Janine BERNARD

- "Seule" de Janine NOWAK

- "D'ici là" de Rémi DANO

- "Des bagages qui mènent nulle part" d'Angeline LAUNAY

- "Pourquoi pas" de Séverine CHAISE

- sans titre d'ARGOPHILHEIN

- "Le destin d'un arbre ou l'arbre du dessin, dessein ?" de Marie-Odile GUIGNON

- "Les yeux de Rosetta" de SRIBUS

-"Ces conseils tu suivras, prince charmant tu seras" de Régis MOULU

 


"Vie de bottes" de Janine BERNARD et cie...

Thème choisi : Le vécu d'une paire de bottes en automne
Forme d'écriture souhaitée : Sans

- Toinette tu dors ?
Toinette, elle repose, avec son talon tourné vers le haut du couvercle.
Moi, c'est Germaine, dit "pied-gauche", celle qui porte bonheur.
Elle, c'est Toinette, dit "pied-droit", le pied triste. Notre premier berceau, c'est cette boîte en carton blanc. Il y fait sombre. De temps en temps, on se prend un flash de néon quand le couvercle se relève et qu'une petite blonde ou brune, plus curieuse nous regarde. Deux bottes de daim rouge, prêtes à être enfilées, prêtes à filer pimpantes sur l'asphalte.

Nous avions une vie assez caoutchouteuse jusqu'au jour où nous sommes tombées amoureuses de deux chaussettes siamoises, nous qui étions jumelles. Nous les avions appelés : "Lui" et "l'Autre" afin d'avoir chacun le sien. Nous les retrouvions à chaque fois dans des états différents : ils étaient fumants, troués, la tête sur la queue quand les chaussettes étaient usées et avachies sur elles-mêmes.
Lui et l'Autre ne se quittaient jamais même quand nous nous disputions, nous, les jumelles. Mais, un jour…

L'Un fut chaussée avec Toinette et l'Autre chaussait Germaine par des pieds parfumés au laurier-sauce…
Et voilà, c'est parti pour une partie de "chausse" pardon de "chasse" dans la basse cour.

Bottes crottées de l'orteil au mollet, Toinette et Germaine savent ce qui les attend désormais : une toilette bien douce, histoire, pour elles, de se refaire une beauté. Application d'une crème de jour aux senteurs provençales servira de base à l'application du fond de teint. Croyez vous qu'un peu de rouge à lèvre, fera assez coquet ?

- Certes ! Mais où nous embarquent ces pieds souples et décidés ? Quelque part ? Ailleurs ?
- Comme la terre est froide… Le carrelage de la maison aussi, d'ailleurs…

Germaine et Toinette s'en étaient allées pour une promenade tout à fait nouvelle et étrange qui leur rappelaient toutefois, des souvenirs d'enfance.
Des allées et des allées de congenères s'étalaient devant elles ; un éclairage blafard illuminait des centaines de pantoufles, escarpins, bottes et autres chauisses en tous genres. Que se passait-il donc ? L'arrêt se fit devant les bottes…
Toinette, la triste, s'effondra en larmes, pensant que sa dernière heure était arrivée.

- Mais non, dit Germaine. Regardes toutes les bottes, les chausses, et aussi de nouvelles bottines sont là, devant l'âtre de la cheminée : le feu clignote de joie devant tous ces pieds revêtus, protégés et venus d'ailleurs : mystère du feu. Cela sent bon la vie, l'ame se réchauffe et…
- Et puis Basta ! dit Germaine. Après tout, nous sommes conçues pour aller loin. Pourquoi rester ici, à tourner en rond dans cette boutique éclairée d'un vilain néon ? Partons, prenons la route, filons vers des cieux enchanteurs. Découvrons le monde et ses mystères. Osons franchir le pas. EN AVANT !

Bon, voilà, je m'appelle Karl Lagersfeld, je suis styliste chez Chanel et je me fous royalement de Germaine et de Toinette. Tout ce qui m'importe, c'est la prochaine collection et on va en "manger" de la botte ! En cuir, en sky, en daim, en fourrure, avec ou sans talon, dans toutes les couleurs de l'arc en ciel. Alors, si Germaine et Toinette ne sont pas contentes, qu'elles le disent tout de suite, car je ne veux pas sa "boter" ma collection à cause d'elles !

Et puis, hop, voilà qu'une paire de jambes interminables enfilent nos deux commères et les entraînent sur le podium. Même pas le temps de dire "ouf", les voilà éclairées, pleins feux, à coup de flash sur les semelles, aussitôt parties, aussitôt revenues, une chose est sûre. Elles n'ont pas tout suivi.

Et les semelles commencent à s'user. Le temps de la collection touche à sa fin. Les kilomètres des défilés se font sentir dans les bottes.

Toinette et Germaine sont lasses, c'est vrai. Toinette a bien remarqué que Germaine était trouée. Mais elle n'a rien dit, pour ne pas la vexer ou l'effrayer. Ca a beau être un défilé vintage grunge, Karl ne va pas, pour autant, tout accepter. La fin est proche. Où sont les dimanches champêtres et crotteux où les deux comparses s'en allaient marquer de leurs empreintes éphémères les chemins de traverses ?

- Toinette, ça va mieux ta douleur au talon ?
- M'en parle pas. Heureusement qu'elle nous a remplacées. Quel bonheur la retraite ! Ce placard à balai est d'un chic. Fais bien chaud sous le tuyau et on se repose bien.
- Dis, Germaine, tes désirs de vieille tu en as aussi ?
- Peut-être un dernier Noël. Avec le rire des gosses, histoire de se sentir vivre encore une fois, juste pour entendre, sans fatiguer, bien molles, en attendant…
Pétard de Dieu ! Quelle vie on a eu ! Mon daim en transpire encore, des dernières danses ; il ne s'en est pas remis. La tuberculose des boîtes tu sais, c'est pas drôle. Des trous partout, mais bien secs. Je crache presque pas.
Toi, ma Toinette, c'est la semelle, moi c'est le mollet.
- T'as peur toi ?
- Evidemment !
- Tu crois qu'elle nous laissera ensemble ? Elle a dû jeter notre premier berceau. Alors dans quoi elle nous mettra ?
- Tu sais, berceau, cercueil, c'est du pareil au même, à notre âge, au bout, c'est le fond de la benne, alors seule ou pas…
- Oh ben, quand même avec toi à côté, ce serait mieux !

La dernière vision de Germaine, avant de fermer les yeux, c'est une dent monstrueuse en acier qui frolait son mollet douloureux et le cri de Toinette presque inaudible dans le vrombissement ambiant.
Puis, plus rien. Une main, et une voix chevrotante qui disait :

- Eh ! Karl, vise un peu, pas mal les bottes !

Et un bras tout violacé l'a saisie par le collet. Elle a senti l'odeur d'un pied repoussant.

- Il y a des retraites pires que la mort… s'est-elle entendu dire en récupérant un peu de souffle. Et puis, très vite, elle a tourné la tête vers la droite.
Toinette était debout toute raide à côté elle, essayant de garder l'équilibre.

- Increvable les bottes en daim, a dit la voix chevrotante. J'avais presque les mêmes avant que tu claques tout notre fric au Casino. Eh Karl, je te parle !

Germaine a fait un clin d'œil à Toinette. Un défilé chez les clodos… peut être, mais que des célébrités !



"Seule" de Janine NOWAK et cie...

Thème choisi : La femme et ses mystères
Forme d'écriture souhaitée : Récit

Les yeux dans le vague, alanguie sur le canapé du salon, elle s'imaginait frottant sa lampe d'Aladin ; et voici qu'apparaissaient tous les personnages de son cinéma personnel.
Elle se voyait déjà dans un de ces cabarets parisiens bien connus, où les nuits ne finissent jamais et où les hommes, tourmentés par l'alcool et les remords, la regardaient avec désir et envie, comme un chasseur pourrait convoiter se future proie.
Mais sur la scène, sous les projecteurs, elle devenait fulgurante, insaisissable, vivante ; et sa voix de cristal réveillait en chacun l'envie d'accéder au divin.
Son chant, de plus en plus langoureux, envoûtant, enveloppant, transportait les spectateurs dans un état proche de l'hypnose.
Ou alors, elle s'imaginait montant un fougueux destrier, battant la plaine et les steppes telle une déesse pressée, cherchant le beau mortel esseulé pour croquer avec lui la pomme de ses rêves.
Qui l'emmènerait vers ce rivage turquoise et blanc où la mer battait les flots à chaque vague, alors que le soleil irradiait de son briquet de feu ?
Fumer … Voilà son envie de l'instant. Et sa lampe d'Aladin ne pourrait lui donner ce goût de cendre, que seule, avec elle, partageait sa gitane en robe bleue. Une clope. Un mégot même ferait l'affaire ! Se vendre pour cette chaleur dans la poitrine. Elle ferma les yeux.
Tout son mystère devrait-il se révéler au travers d'un malheureux glaviot ? Elle avait l'âme ouvrière, le bras travailleur et l'esprit enfumé. Mais ses intentions étaient nobles et ses rêveries pures : rien ne saurait donc la perdre, même pas l'abîme qui provenait de ses pupilles dilatées.
Elle voyait encore un mirage ; un monde heureux où hommes et femmes se comprenaient, se respectaient, partageaient, en un mot : s'aimaient. Et quand elle frottait sa lampe d'Aladin, le génie de l'esprit humain lui apparaissait : ce petit homme mesquin et lâche qui avait peuplé la terre jusqu'alors, s'était métamorphosé en un homme fort et généreux qui avait su juguler sa passion de la domination en faisant la synthèse de la mesure apollinienne et de l'ivresse dionysiaque qui le divisait si fort jusque là.
Allait-on faire fi de ses mystères ? Serait-elle démasquée par un ridicule cavalier en train de délirer ? Elle frotte sa lampe … une onde de plaisir inonde sa chair … un orgasme l'emporte dans l'au-delà des brumes de son cerveau blanchi par la drogue.
C'en est trop ! Elle ne peut souffrir de voir ainsi son être dominé par des substances illicites. Elle aussi, elle a du potentiel ! Assouvir tous ses désirs, avoir envie d'avoir la force de se lever, de bouger, regarder par la fenêtre le rayon de soleil qui lui caresse la joue. Elle regarde tendrement sa lampe d'Aladin. Elle sait qu'elle n'en aura plus besoin et la remercie cependant de lui avoir ouvert les yeux sur le monde, sur sa personne et ses aptitudes.
Et tandis qu'elle laisse choir la lampe sur le tapis noir, Aladin secoué, Aladin réveillé, déroule son puissant torse bleu. Il se penche sur la dame …
Elle demeura interdite quelques instants. Jamais, il ne lui avait été donné de voir un être aussi beau, aussi lumineux. - " Tu peux me demander tout ce que tu veux " - lui dit-il. Une sensation de chaleur l'envahit soudain, laissant augurer en elle un désir très profond. Et pourtant, une autre idée, un fantasme récurrent s'imposa à elle, un voyage dans le temps.
Cet être si beau … Jamais elle n'avait eu un tel choc psychologique ; elle avait du mal à y croire … Mais la chaleur monte ; elle est là, bien présente, qui grandit et s'étend. La femme s'affaiblit ; ses jambes tremblent de plus en plus. Le désir de fondre en cet être est insupportable, mais il lui ouvre ses bras et s'envole pour ce grand voyage qu'elle venait de prévoir.
La femme a un frisson. Elle se secoue, regarde autour d'elle, surprise. Elle est toujours là, seule sur son canapé, de retour dans sa vie, dans sa petite vie qu'elle retrouve telle qu'elle s'est toujours déroulée jusqu'à présent : lisse, assez douce - il est vrai - mais sans soubresaut, mais dépourvue de caresses et si fade, si vide, si désespérément vide de présence, si VIDE, si V I D E !!!

 

"D'ici là" de Rémi DANO et cie...

Thème choisi : La perte ou l'oubli.
Forme d'écriture souhaitée : Poésie.

Sur les bancs, sous les arbres, sur les quais de Paris,
Ce vent agité, plus galopin que lui
Sous son aile lui a pris
Un peu son bien, un peu son lui

Sous les bancs, sur le feuilles, le vent froid de Paris,
Froid sous le pont, froid dans le cœur du passant
Qui enfile ses pas, plus pressé que le vent.

A côté des bancs, tombant des arbres, une bise capitale
Vient lécher les joues et aspirer l'esprit
Des passants meurtris qui cherchent à s'oublier.

Près des bancs, sous la pluie,
Le passant qui s'oublie cherche ses mots
Et le vent lui confie sa mémoire

La pluie n'en finit pas de pleurer.
Sur les sols délavés
Les pas s'en vont en s'effaçant
Et l'oubli avance à grande vitesse
Et l'ouragan n'a de cesse…

Sur les bancs, sous les arbres, sur les quais de Paris
Tous vivent les gouttes de perles
Tous s'oublient dans la pureté de l'or bleu
Sur les bancs, sous les arbres, sur les quais de Paris
Oublier un instant le temps qui coule
Arrêt sur image, que la nature est belle

Un enfant a perdu sa balle et la cherche en courant,
Un jeune homme marche depuis des heures ; son cœur saigne.
Une petite fille sourit
Car elle a oublié pourquoi elle est sortie dans la rue

Sur les quais de la Seine
Les amoureux passent
Et l'oubli trépasse.
Le vent sous les arbres
Est sorti de la scène.

Et le chat malin guète, les moustaches en avant,
Et les oreilles pointées vers le vent,
Hérissé attendant l'arrivée de la balle roulant
Jusqu'à ses pattes cotonneuses et habiles
Au son des rumeurs de la ville.

Sur l'asphalte mouillé,
Une fille est tombée.
Une fille séduite, puis abandonnée
Telle une épave sur les rochers.

"On s'est connu
On s'est reconnu
On s'est perdu de vue
On s'est reperdu de vue
On s'est retrouvé, on s'est réchauffé
Pourquoi se séparer ?"

Oui, j'avoue, ce n'est pas de moi ! Mais de qui est-ce ?
J'ai oublié…

Puis ses yeux verts ont dépassé la lumière
Du feu tricolore du coin de la rue
Après ça, je ne me suis jamais plus reconnu.

Au feu tricolore, j'ai traversé
Sur les bancs de l'autre côté.
Je me suis assis.
Sur le banc de l'autre côté
J'ai rencontré l'inconnu.

Que deviendrai-je demain ?
Que suis-je aujourd'hui ?
Peu importe le chemin,
Tant que je reste ici.

 

"Des bagages qui mènent nulle part" d'Angeline LAUNAY et cie...

Thème choisi : Péripéties dans un hôtel.
Forme d'écriture souhaitée : Récit.

- C'était la première fois que je passais la nuit dans ce genre d'hôtel. J'avais réglé tous les préliminaires par carte bleue à l'extérieur, et je me trouvais maintenant dans le hall d'entrée, mes bagages à la main.

- Il faut dire que j'avais passé une folle journée, une de ces journées où l'on se dit qu'il doit y avoir un rigolo là-haut qui tire les ficelles, juste histoire de voir jusqu'où il peut pousser la plaisanterie… Et là, dans le hall de cet hôtel, je compris que la journée n'était pas terminée…

- J'attendis au pied de mes bagages, perplexe. Rien, rien ne se passait. J'étais fort songeuse… lorsque brutalement un homme vint à moi, le sourcil grimaçant. Je sursautai…

- Ce regard froid était la seule note discordante dans ce physique de jeune premier.

- Je me réveillai en sursaut, le visage, d'après mes proches, blême, suffoquant, toussotant, les yeux creux, tremblant, presque en " transe ", bref pas bien du tout, et bizarrement, parlant sans cesse d'un hôtel et d'un homme ; mais " heureusement " ce n'était qu'un rêve. Ouf !!!

- Du coup, je décidai de me lever malgré l'heure très matinale, d'avaler mon café en vitesse et de sortir pour marquer de mes pas cette neige toute fraîche qui n'en finissait pas de dégringoler en plein mois d'août. Ce pays avait quand même quelque chose d'extraordinaire et je m'en allai percer les mystères de la vie d'ici.

- J'avançai avec difficulté dans cette neige, fis le tour de l'hôtel, quand tout à coup, le chemin se dégagea pour mener à une maison. Je pris ce chemin, contente, légère, soulagée de ne plus être enneigée. A la porte de la maison… un homme… Stupéfaction ! Je reconnus le jeune premier au regard menaçant.

- Je restai coi, quelques instants. Il me dévisagea de son regard noir… - C'est vous qui avez oublié vos bagages dans le hall de mon hôtel, rue Marcel Cerdan - 13220 - à VEAU-LE-TETANT ? La phrase résonna plusieurs secondes dans les tréfonds de mon être. Il faut dire que, de ma vie, je n'étais jamais descendue dans ce lointain département des Bouches-du-Rhône !

- Retrouver mes bagages à Veau-le-Têtant dans les Bouches-du-Rhône ! En voilà un projet… Alors que la neige s'était remise à tomber, et que la grande horloge électronique au-dessus du feu rouge marquait " 31 août ", 15 H 15. C'était un cauchemar cette planète où je divaguais depuis des heures… Et Marcel Cerdan, pourquoi était-il mort, celui-là ?... si jeune, si beau, si fort et amoureux de son Edith comme un taureau aux abois ! Est-ce que j'étais amoureuse moi ? - Non, j'avais à découvrir ce rêve infâme et ces bas-fonds où mes pas ouatés me dirigeaient. …/…

- Il faisait froid, j'avais chaud. Il faisait tellement froid que la neige était au moins à - 0° C. " J'avais les pieds bleus, marbrés en violet. Quelle petite sotte j'étais à avoir oublié de mettre ce matin des chaussures. Et pourtant, je laissais des traces de pas " façon dessins de pneus " dans la ouate. Une cuvette masseuse : je n'avais plus que ce rêve en tête. J'appelai donc la réception sans dire " allo ".

- A Veau-le-Têtant, rue Marcel Cerdan, le réceptionniste de l'hôtel m'annonça que je n'étais pas notée sur ses registres, mais qu'effectivement des bagages y avaient été retrouvés portant mon nom et mon adresse… Et que le Directeur de l'établissement était venu en personne pour les rendre… et qu'il était effectivement très beau… C'était un ancien acteur de films X.

- Que me fallait-il négocier pour retrouver ma sérénité ?... une chambre chaude, un lit douillet… Je ne pouvais pas m'installer dans ma valise !

- Tout d'un coup, je compris : Raymond Devos - me direz-vous ! Eh oui, tout comme lui, j'avais été victime de ma valise qui avait souhaité se faire la malle. Encore heureux qu'elle n'ait pas eu l'idée de la cantine de mon boulot… j'aurais été la risée de toutes si elle avait été déposée, mal ficelée au centre du réfectoire ! Vous imaginez…

- Tout ça finalement n'était qu'une histoire de valises oubliées, d'hôtel paumé dans les Bouches-du-Rhône, et de veau têtant qui ne semble avoir aucun rapport avec un homme très beau bien que classé X ! Il ne me restait plus qu'à retourner dans le hall d'entrée où j'avais remarqué que quelques braises restaient encore dans la cheminée… Et j'avais vraiment besoin de me réchauffer !

 

"Pourquoi pas" de Séverine CHAISE et cie...

Thème choisi : Pourquoi pas
Forme d'écriture souhaitée : Sans.

Un matin de brume sur Paris, à l'aube, tout est calme, le ciel n'appartient qu'aux ailes et aux regards matinaux. La mouette s'attarde au sommet de la tour et du haut de son plongeoir cherche :
- " De quel côté commencerai-je ma quête de l'espoir ?
- Vers l'est, rien de nouveau.
- Vers l'ouest, trop de brume.
- Vers le nord, trop de circulation.
- Ah ! Vers le Sud-Est. Une trouée bleue. "

Ce tableau monochrome et chaleureux lui rappelle son chez-elle, et puis l'odeur iodée de l'écume charriée par les vents tourbillonnants de la côte jusqu'à ses narines ridicules. " Aaahhh ! Pourquoi pas. Pourquoi pas… " Et pourquoi pas, plutôt, vers un je ne sais où ?

Où me mèneraient mes ailes si je m'élançais de si haut ? La hauteur ne m'a jamais fait peur. Et cette trouée bleue, là, juste à l'angle de la Seine qui brille de tous ses feux. Le soleil est haut et le froid vif mais sur la péniche rose, tout en bas le petit pignon de pain démange bien le bec.

L'espoir de quoi ce matin ? Manger ? Se perdre ? Se retrouver ? Se rappeler de quand elle était " œuf " ? Ou s'endormir comme un pigeon que les gaz d'échappement auraient figé et grisé ? A peine eut-elle fini de planer dans tête de moineau améliorée qu'elle fusa vers la péniche, les pieds palmés en premier.

Cette mouette, fille d'un moineau et d'une cane, tel un animal mythologique, atterrit comme un cygne sur la péniche. Et là, sur le pont, la fenêtre odorante de la cuisine. Une petite faim, due à ses efforts intellectuels matinaux, l'incita à pénétrer.

" Il fait bien noir dans ce local… Qu'est-ce qu'il y a croquer ici de si parfumé ? " Un vol au vent trônait sur la table : d'un coup de bec elle s'en empare et d'un coup d'ailes tente l'escapade : badaboum, ploum, tapoum, raboum, blingueboum, blingbinding, dingzing… zing… ing...
S'était-elle embarquée sur le " pourquoi pas " ?

Pourquoi pas ci, pourquoi pas là ? La tête ébouriffée et le cœur émoustillé par ses facéties, sans réfléchir la mouette reprend son chemin.
Ce " coup de vol ", loin d'être un coup de maître aurait bien mérité un coup de main. C'est toujours mieux de naviguer en équipe… mais c'est bien sûr ! Peut-être qu'en ce petit coin de bleu, au loin, se trouve une armada de son genre. Pourquoi pas se retrouver comme à ses origines près de ses racines ?

Elle s'est bien embarquée sur le " pourquoi pas "… maintenant, elle le sait, elle en est sûre. Cette carcasse mille fois transformée, elle a eu raison de la suivre. Car, il ne faut pas en douter, ses cales recèlent un mystère plus précieux qu'un trésor.

Alors que faire ? Partir ou rester ?
Ballottée entre l'envie de rester et d'en savoir plus sur ce trésor et celle de tracer un cap vers le bleu du sud-est, la mouette s'élança finalement dans les airs, emportée par l'envie d'aventure.
Que Paris est merveilleuse se dit-elle en survolant Notre-Dame !

Oui, mais je rêve d'une plus longue aventure et j'irai bien avec mon groupe de théâtre en Russie dit-elle, demander conseil à Monsieur Anton Tchékhov lui qui sait tout de moi et des autres mouettes.

D'un autre côté, si je pars, si je quitte Paris, je ne reverrais plus MOUETTITOU, l'amour de ma vie. Bien sûr, on me rétorquera qu'il faut souligner sa volonté de ne pas laisser arrêter par des considérations d'ordre sentimental. Ah, l'amour…

Personne ne la sait encore, mais la " pourquoi pas " est un langage codé, qui a été " inventé " par le Mossad, les services secrets israéliens dans les années 50-60. En fait, il s'agissait en utilisant cette expression de faire passer des messages dans lesquelles l'expression était utilisée, " on passait " ainsi des messages.

Et prenant son " pourquoi pas " sous le bras, notre mouette décida d'aller casser la graine chez son vieil ami notre damier du coin de la rue, histoire d'évoquer leurs idées de toujours et leurs interminables débats, elle en était sûre maintenant, l'espoir naîtrait de là.

 

sans titre d'ARGOPHILHEIN et cie...

Thème choisi : La guerre.
Forme d'écriture souhaitée : essai.

Y a-t-il une guerre juste ? Jusqu'au début du XXème siècle, les historiens dans leur majorité et la presse qui prenait le relais n'ont eu de cesse de le prouver. L'après- seconde guerre mondiale et ses atrocités - gazage et bombe d'Hiroshima - ont développé une nouvelle dimension au concept de guerre, appelé crime contre l'humanité.

Mais qu'en est-il actuellement ? Justice et guerre peuvent-ils toujours être considérés comme des synonymes ou inversement comme des antonymes, des antithèses ?

Pourquoi faudrait-il toujours comparer les sens des mots sous forme de dualité : pour-contre, blanc-noir, vérité-mensonge, bon-mauvais, guerre-paix, justice-injustice, toujours-jamais ?

La terre offre mille et un bonheurs que l'avidité humaine oublie de sentir, de palper et de jouir. Au nom de quoi ? Justice, guerre ... et pourquoi pas tout simplement par soif de pouvoir de l'un par rapport à l'autre. L'humain oublie qu'il n'est qu'un élément du vivant et sa soif de domination l'entraîne sur des chemins destructeurs. Il s'élimine.

Il crie vengeance ... et ce processus n'a pas de fin.

S'il y a une guerre juste ? Guerre rime aussi avec lutte, défense... La guerre contre la pollution, la guerre contre l indifférence, la lutte contre l'extinction du guépard d'Afrique... des poissons également. Pouvez-vous imaginer une mer sans poissons ? On parlait de partage dans un essai précédent . Il faut se solidariser afin de freiner l'appétit de l'homme à se battre pour une terre ; important bien sûr mais n'avez-vous pas remarqué que c'est toujours pour un tout petit bout de cette terre qu'il se bat ?

L'homme est exigeant. Il veut toujours voir plus loin que le monde "étriqué" (d'après lui) où le hasard l'a fait naître. Et ce "plus loin", depuis la nuit des temps, il souhaite se l'approprier, en faire "sa chose".

Comment être pour la guerre ? C'est un non-sens ! Mais en même temps, nous menons tous les jours, tout le temps, aussi anodines soient-elles, des guerres contre la bêtise humaine, contre l'in- justice, contre des croyances absconses et inintelligibles.

Et tout cela pour récolter quoi ? La peur, la terreur, le malheur, accumuler les rancunes, les vengeances ...

Pour récolter la paix !

Tout ça, c'est une histoire de référentiel. Les hommes se feraient moins la guerre s'ils se comprenaient et s'écoutaient. Dans mon référentiel, ce que tu fais, c'est de la barbarie. Dans le tien, ce que je fais, c'est du vol qualifie. Il n'y a pas de torts, que des raisons. Prenons donc le temps d'apprécier nos différences.

Pour apprécier une différence, il faut déjà percevoir que l'autre est différent. Hors nous passons notre temps à projeter sur l'autre ce que nous sommes et ce que nous pensons. Et mutuellement : moi, je ..... moi, je..... L'autre, lorsqu'il en a assez, se rebelle. Et badaboum ! Hiroshima et compagnie ! Ecouter, comprendre, accepter. Trois verbes pour embrasser le monde et le monde nous embrassera. Utopique, non ?

"Pas si utopique que cela" si nous entrons à partir de maintenant dans la résistance. Je rêve de valeurs qui nous permettent de grandir, grandir assez pour comprendre notre petitesse, assez pour avoir l'humilité pour se rappeler qu'on est tous au départ qu'un peu d'humidité... et que c'est seulement après que le temps se gâte, que la prétention tourne à l'orage.

En somme, ce qui nous sépare, c'est notre universelle petitesse et ce qui nous unit, c'est notre faculté individuelle d'aimer. Entre humanité universelle et intérêt particulier, la guerre s'érige en justice. Mais pour qui ?

 

"Le destin d'un arbre ou l'arbre du dessin, dessein ?" de Marie-Odile GUIGNON et cie...

Thème choisi : Histoire d'un arbre.
Forme d'écriture souhaitée : Sans.

Il était une fois une petite graine qui avait décidée d’aller pousser ailleurs qu’à l’ombre de la ramure de ses ancêtres. Elle partit donc à la recherche d’un terrain pour germer en se blottissant dans les bras du vent.
C’était la nuit, il faisait froid, alors le vent la déposa doucement dans un lit de terre chaude. « Petite graine » se couvrit délicatement de l’humus environnant et s’endormit paisiblement le temps d’un hiver. C’est pendant ce temps que la nature œuvre et s’engage à faire fructifier quelques mois de bien-être doucereux.
Vivement le printemps qu’enfin surgissent les bourgeons, la vie ! CRR...CRRAK… S’entrouvre le sol…surgisse la graine au vent brutal, à la lumière aveuglante, au territoire de tous les possibles.
« Où suis-je ? » Se demande la nouvelle née végétale. Autour d’elle de plantureux arbres trônaient sur une terre orangée et aride. On aurait dit qu’ils étaient là depuis toujours… On les appelait les baobabs. « Comment est-ce possible ? Toi, si petite, si discrète, endormie dans la terre ouatée tout cet hiver, as-tu pu la casser, même l’exploser pour devenir cet impressionnant monstre africain ? Tu es utile maintenant pour ton ombre et bien d’autres… ». « Mon ombre ? pensa l’ex-petite graine… Comme il y va le voisin ! Je suis encore toute petite au sortir de l’hiver. Pour cette année je ne pourrai guère faire de l’ombre qu’aux fourmis » .
Ah la là on va en « casser la graine »! Oh non, c’est bien trop familier… Mais ne nous fions pas aux apparences et surtout ne nous voilons pas la face, tout le monde y a pensé, mais personne n’a osé en parler, hé oui, quand on parle de « petite graine » à un enfant ( A moins que ce soit un adulte complètement attardé ) c’est pour expliquer comment on fait les bébés, un peu comme cette publicité où un petit garçon demande à son papa :
- Papa c’est quoi cette bouteille de lait ?
Plusieurs fois et à force d’absence de réponse le petit garçon « finit » par demander à son papa :
- Papa , comment on fait les bébés ?
Et là évidemment , le papa répond à la question :
- Papa c’est quoi cette bouteille de lait » . Il ne faut pas mentir aux enfants.

« C’est pas bientôt fini de m’appeler « La petite graine »! Dites-moi, celui-ci compte refaire mon éducation florale ou quoi ? Non, pour cette année j’abriterai bien les fourmis, d’accord, mais j’espère pousser bien assez vite pour voir ce qui se passe un peu plus haut. En attendant, observons ce qui se passe par ici ».
Une petite mélodie se fait entendre en haut du baobab voisin, celui à droite… La mélodie des feuilles égraine un chant, une berceuse, un appel… « Je pousse très fort sur la pointe de mes jeunes racines pour atteindre les premières feuilles. Hum ! elles sont douces, sentent bon, j’ose à peine les effleurer… mais elles m’attirent.
C’est que je suis une grande maintenant. Je vois le soleil se lever à l’aurore et je le sens réchauffer ma crinière effeuillée de plus en plus tôt. Oui, oui, oui !!! le grand baobab d’à coté, il me dit que c’est parce que l’été arrive, que les jours s’étirent et patati et patata… Mais moi je sais bien que c’est rien que pour se moquer de moi. Un jour, tiens, je m’en irai lui manger le soleil sur la tête. A-t-il oublié que lui aussi, voici fort longtemps, certes, il a été tout petit comme moi ? Et si je n’abrite, grand baobab, cette année, que le peuple des fourmis et des insectes, l’an prochain, pour mon anniversaire, je serai l’arche de Noé des antilopes et des zèbres ! Toi, tu garderas les girafes. Ainsi pas de jalousie.
Arrête de me sourire de cet air niais que prennent tous les grands pour regarder les petits. Aïe ! j’ai reçu un coup de racine. Quelle prétention !
Sous le coup de l’émotion je me mis à pleurer, non, il pleuvait ! Comme quoi dans le petit apparaît le grand, comme quoi les nains baobabs sont des nababs. Mon espoir était au plus haut, j’entrais dans la saison de mes désirs, la steppe allait souffrir. Enfin plutôt la savane, mais qu’importe, nous les baobabs nous peuplons l’Afrique.
Et de la pluie qui ruisselle sur mes jeunes feuilles et inonde la terre, de mes racines, naît une merveilleuse nouvelle : la nature va reprendre vie, les pousses vont éclorent, les graines vont… ? »

Et voilà la découverte ou la révélation : la petite graine n’était qu’une …qu’une enveloppe d’arbre… Et il avait fallu toutes ces aventures quelque part dans le monde par le plus grands des hasards…

Le hasard fait-il bien les arbres ?

 

"Les yeux de Rosetta" de SCRIBUS et cie...

Thème choisi : Voyage intérieur
Forme d'écriture souhaitée : Sans.

Stazione termini - Roma.
L'écho des hauts parleurs résonnait au loin, emporté par le vent. Rosetta quitta à l'aube, pour un voyage qu'elle savait sans retour. Quelque chose au fond d'elle avait compris que plus rien ne serait jamais comme avant…

En effet, Rosetta venait de rompre après quinze années de vie commune pleine d'un amour passion fou ! Ne lui demandez pas pourquoi ? Elle ne vous répondra pas, non pas qu'elle ne le sache pas, par pudeur sans doute. Et pourtant…

Quand le passé revient par bouffées, on risque d'être inconsolables.

Rosetta, ce nom fait penser à un film de Fellini ou de Visconti, ce nom flirte avec l'amour et l'imaginaire. Elle nous renvoie comme par magie dans son plus for intérieur, et dans son espace si personnel, précieux et à la fois ambigu. Finalement, qui est Rosetta, nous la connaissons bien mal, non ?

Alors, elle prend ses palmes et son accordéon, et décide d'avancer, là, maintenant, de regarder droit devant, et d'imaginer de quoi elle pourra repartir. Peut-être de cette chanson fredonnée par le jeune homme qui passe près d'elle à l'instant, il y'a encore tellement à faire dans sa vie.

Elle le suit. Ils ne se parlent pas, mais comprennent vite qu'ils vont poursuivre leur route ensemble. Découvrir le monde et traverser les océans à la palme en chantant.

Lui est pêcheur de " poisson trompette ", ça tombe bien. Pourtant, il l'avait d'abord pensée touriste pressée, mélomane à ses heures, et désireuse de lorgner sur les fonds rocailleux de la méditerranée. Mais son regard perdu et son pas souple comme en apesanteur, semblant la mener malgré elle, l'avaient vite charmé et uni à cette mystérieuse étrangère.

Des poissons trompettes, il en pêchait des pleines caisses. Sur la criée, ils se vendaient bien et la robe rouge de Rosetta malgré ses yeux pâles, dans le vague, ferait d'elle une vendeuse des plus présentables. Rosetta aimait-elle le poisson ? Rosetta aimait-elle la trompette ? Il n'osait le lui demander. Sa main serrait la sienne et le port approchait.

Aimerait-elle le port ? Lui agripperait-elle sa main ? Calmerait-elle ses ardeurs carnivores et sa passion amoureuse ? Ferait-elle enfin quelque chose pour estomper son teint d'anchois ? Sa tête était comme une corne de brume, son cœur flottait comme une bouée de démarcation, c'était le moment pour dire…

Tu veux ou tu veux pas ? Non c'était trop abrupt. Et puis, même dans le fond d'un petit bateau, ils ne passeraient pas incognito. Et si elle était une femme à l'amour bruyant, aux gémissements intrépides ou furieux ? Ou une amazone qui aime frapper sa monture ? Valait mieux attendre un petit coin plus tranquille, une chambre discrète où il pourrait enfin la connaître et lui dire…

Le cœur de Rosetta tanguait au fond du bateau. Pourquoi s'était-elle embarquée dans cette galère ? La mer devenait de plus en plus houleuse et son estomac se remplissait de dégoût. Sa tête n'allait pas tarder à éclater.

Rosetta pétrie par la peur n'osait surfer sur un souffle d'espoir. Dans sa tête se mêlaient autant de scénettes pitoyables que de bonheur à l'état pur. Aurait-elle assez de courage pour lui dire…

Tu sais, tout ça ne rime pas à grand-chose. Pourtant, souvent j'ai beaucoup d'espoir mais pas ce soir. Regarde, mes yeux changent de couleur. Quand ils sont verts, j'ai envie mais quand ils virent au jaune, j'ai envie de fuir. De me fuir. De te fuir.

Attendons demain…

 

"Ces conseils tu suivras, prince charmant tu seras" de Régis MOULU et cie...

Thème choisi : Tout ce qui est au programme du CAP (Certificat d'Aptitude Professionnelle) de prince charmant.
Forme d'écriture : Expression par items intitulés "leçon n°…".

Pour le bien-être de sa belle :

Leçon n° 1 : cacher toutes les friandises de son domicile lorsque sa belle lui rend visite.

Leçon n° 2 : ne pas manger de saucisson à l'ail avant de lui rendre visite mais grignoter de la réglisse pour augmenter sa tension.

Leçon n° 3 : apporter le plus grand soin à sa tenue vestimentaire en l'imprégnant subtilement de charme aimanté, irrésistible au toucher.

Leçon n° 4 : être soi, rire et jouir de la vie dans son intérieur pour encore mieux le partager avec elle.

Leçon n° 5 : se déguiser épisodiquement en Robin des bois, cheikh d'Arabie, corsaire du roi ou autre rôle évocateur pour accueillir sa promise, le soir au coin d'un bois.

Leçon n° 6 : la surprendre.
Lui donner rendez-vous dans des lieux improbables, merveilleux, inaccessibles comme par exemple au sommet d'un arbre majestueux (ne pas oublier de lui installer la corde), au fond d'une grotte ou d'une caverne introuvable, en prenant soin de baliser l'itinéraire de magnifiques perles lumineuses. Lui écrire des poèmes magiques en lettres d'or sur des feuilles de chêne à la lumière de la lune.

Leçon n° 7 : Elle craquera, mais non plus pour les bonbons. Elle craquera obligatoirement devant tant de merveilles, surtout si dans la grotte où s'offrent des stalagmites fondantes, elle se baignera nue et s'imbibera de l'eau emplie de baisers étoilés.

Leçon n° 8 : Il devra se laisser aller à sa fantaisie et à sa désinvolture naturelle. Un exemple ? Il pourra, tel un Roméo, revêtu d'un costume satiné, interpréter des chansons de Luis Mariano sous le balcon de son aimée.

Conseils :
- être né pour le théâtre ;
- être metteur en scène à Saint-Maur et pas à Paris ;
- animer des ateliers d'écriture à Saint-Maur et pas à Paris ;
- ne pas avoir de portable (eh oui, même à notre époque !)
- être, à la veille de représentations théâtrales, un tantinet tendu et stressé ;
- vivre sa passion à fond la caisse ;
- être généreux ;
- être disponible .
Au total, cela fait UVPC, Un Vrai Prince Charmant !

Leçon n° 9 : apprendre par cœur la formule "en chocolat, tu te changeras" afin de pouvoir satisfaire sa gourmandise et son imagination quand elle s'essaie à faire la grand chef cuisinier.

Leçon n° 10 : apprendre à donner quelques friandises au compte-goutte avant de partir travailler pour que l'attente de la journée soit plus légère et les retrouvailles du soir riches, souples et gaies.

Leçon n° 11 : lui dire qu'elle est belle et que, nan, elle n'a pas grossi (du moins, il n'a pas remarqué).

Leçon n° 12 : faire la vaisselle sans rechigner (NB : une princesse ne fait jamais la vaisselle !). Ou acheter le sort de "machine à laver la vaisselle" (en vente chez tout bon alchimiste).

Leçon n° 13 : se brosser les dents au moins une fois par semaine (cf. leçon n° 2) avec des racines de gingembre, une langue de griffon ou de la barbe de merlu (lui demander poliment).

Leçon n° 14 : être attentif à chaque phrase ou histoire qu'elle raconte afin de découvrir tous les mots susceptibles de la blesser. En dresser la liste et instaurer un décret définitif les bannissant à tout jamais du Royaume de l'Amour. Et pour éviter tout dérapage verbal inopiné, frotter à chaque instant, toute parole avec le dentifrice du bonheur celui qui émaille les conversations de mots doux à entendre, par elle, évidemment en premier lieu.

Leçon n° 14 bis : en cas de gaffe, dire que c'est son côté grenouille qui a coassé, et que cette ventriloquie ne durera pas. Dépasser cet air con en faisant des phrases longues pour qu'elle n'y comprenne plus rien et que cette forme de charme qui est l'idiotie la gagne elle aussi.
Vous serez ainsi deux cons, mais votre amour ne sera jamais en danger, on ne peut tout avoir !

Les textes présentés ci-dessus sont sous la responsabilité de leur auteur. Ils sont quasiment le fruit brut qui a été cueilli en fin de séance... sans filet !
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