Présentation des photos du spectacle et des textes additifs inédits de Régis Moulu

 

La pureté est proche du vide

très librement inspiré des écrits de Daniil HARM,
mise en scène de Régis MOULU

Spectacle présenté par les deux ateliers théâtre de la Compagnie du Chercheur d’Arbres
les jeudi 28 juin, vendredi 29 juin & dmanche 1er juillet 2007
Durée : 3h10

Photos du spectacle : Collection Murièle DALEAS

C'est avec plaisir et volonté de partage que des textes inédits se retrouvent accessibles sur ce site (écrits additifs de R Moulu). Mais il faut savoir que toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle de ceux-ci nécessite l'autorisation préalable de l'auteur.




*** Première partie ***

« Petites histoires déboulonnantes »

 

BOUCHE DE GAZ !

Arrive un être pitoyable (avec de multiples handicaps, trop pour faire vrai) Il a du mal à parler (douleur oblige alors même qu'il a en plus un fort accent), ce qui le rend attachant et respectable. Un traducteur l'assiste ainsi qu'une traductrice pour sourds et muets.


De gauche à droite : Anne-Marie SOULIER et Philippe MOY

Le petit-fils autoprésumé. - Je, je suis, je suis petit.… Je suis la petite-fille de Daniil Harms.

Le traducteur. - Je suis le petit-fils de Daniil Harms... Je suis, je suis... bon bref, j'arrive à peine à exister.
(après chaque traduction du traducteur, la traductrice pour sourds et muets traduira à son tour, à sa façon ce que le petit-fils aura dit...)

Le petit-fils autoprésumé. - Qui était-il ? Que fut sa vie ? Pourquoi n'a-t-il pas eu d'enfants ? Pourquoi je parle de lui ? Est-ce bien moi qui parle ? Que fait ma bouche ? (S'emballant progressivement au cours de la phrase) Et l'esprit est-il un gaz qui profite qu'une bouche soit ouverte pour sortir afin d'entrer dans une autre ?

Le traducteur. - Je suis à tout moment menacé de disparition.

Le petit-fils autoprésumé. - Mais je vais surtout vous parler de cet homme. Daniil Harms était un écrivain. Il avait une quête, celle d'être libre :

Le traducteur. - Je ne sais même pas si je suis dans l'histoire que je vous raconte, là, dans ce théâtre… à un tel point que je suis sûr que vous croyez que je n'existe pas,

Le petit-fils autoprésumé. - Il aimait par exemple la collision des mots. Il croyait en l'atmosphère des matériaux. Il sonda l'insondable. Il remua comme personne l'immobilité. Et, à force de regarder le vide et le rien, il les rendit spirituels ! Il voulait du vrai, du plein.

Le traducteur. - n'ajoutons donc rien à ce sujet.

Le petit-fils autoprésumé. - La police secrète l'arrête, dit qu'il est contre-révolutionnaire : sa lucidité le condamna.

Le traducteur. - Plutôt, si, dès que je parle, je meurs !

Le petit-fils autoprésumé. - Prison, sortie de prison puis décision de partir en exil. Quoi écrire, comment écrire, comment ne pas risquer sa vie ? Il repartit en prison et mourut lors de sa détention psychiatrique.

Le traducteur. - décidément vous ne saurez rien de moi,

Le petit-fils autoprésumé. - Vaine quête qu'être libre, non ? Rêve sans fond, non ? Quels sont nos actes de libération ? (un temps). Son père, quant à lui, avait été proche d'un mouvement terroriste appelé la "Volonté du Peuple". Renversant, non ? Est-ce que cela pourrait arriver aujourd'hui ?

Le traducteur. - Pire, il paraît même que quand a été écrit ce texte, il n'y avait plus assez d'encre pour l'imprimer,

Le petit-fils autoprésumé. - Il connut lui aussi la prison et l'exil. Bref, que des conneries ! Mais ceci ne passera pas par moi. Ceci ne passera pas par moi. De toutes façons, tout cela est impossible de nos jours. Impensable. Inimaginable.

Le traducteur. - tout ce que je vous dis a déjà disparu… avant de naître

Le petit-fils autoprésumé. - Rigolons, oui, c'est ça, rigolons. Ce soir c'est la fête. Ce soir on le fête. Vive Daniil Harms ! Clap, clap, clap ! Il est le content le Daniil Harms ! Wouaf, wouaf, wouaf ! Il est content, oui il est content !

Le traducteur. - comme quoi il est tout à fait impossible d'être et inutile de le prouver, inutile de le prouver

Le petit-fils autoprésumé. - Ce soir, toutes les folies qui vont être dites ont été écrites par lui. Les enfants aimeront, apprécieront et en redemanderont ! Ses textes sont des bonbons. De bons bonbons. Ronds, ronds, les bonbons bien ronds !

Le traducteur. - … et je disparais faute d'avoir eu quelque chose à raconter.

Le petit-fils autoprésumé. - Alors vive lui, vive l'inattendu, vive l'irreprésentable et vive l'infini du réel ! I have a dream : le rêve que vous pensiez que je sois trop absurde pour être dangereux !!

Le traducteur. - Et pour résumer : rien ne se rejoint, là est notre plus grande certitude !

Le petit-fils autoprésumé sort.

Le traducteur. - (Au public) Ah la la, hou lou lou : je perds espoir, à la vue de cette personne je suis prise en gelée… car le mal s'insère toujours dans le miracle, dans le miracle qu'on ne cesse d'attendre. Le seul problème est de savoir quand ça se produit !
(Au micro) Bonsoir à tous. Le spectacle que vous allez voir ce soir est un non-lieu… intitulé "petites histoires déboulonnantes". Après l'entracte, une deuxième partie, à savoir "le festival des abominations" vous attend. Je viendrai vous retrouver, euh, non, non non, je ne viendrai justement pas vous retrouver à la fin.
(Il part mais trébuche sur Mychine) Eh, vous, qu'est-ce que vous faîtes-là ?

 

LA VICTOIRE DE MYCHINE

FABLE


De gauche à droite : Céline CORNAYRE et Claude WISNIEWSKI

LES FLEURS 1

MES PROPRES VERS

LA LOI DE LYNCH


Aurélie BOCCARA

LES FLEURS 2

VOS YEUX COMME DES CARAFES

LE CONCERT D'EMIL GUILELS

SCENE DE LA VIE QUOTIDIENNE

PHENOMENES ET EXISTENCES (n°2)

A L'HEURE DU COEUR

TOC !

CE QUE J'AIME

AUJOURD'HUI JE ME MARIE


De gauche à droite : Philippe MOY, Valérie RICHARD et Claude WISNIEWSKI

LE BOUDIN DE PORC

L'AME A COEUR OUVERT

LES FLEURS 3

LE POIVRE GREC

LA JEUNE FILLE QUI ETONNA LE GARDIEN

UNE HISTOIRE

LES VIEILLES QUI TOMBENT

A PROPOS DE NOS HOTES

PASSEZ DONC ME VOIR A LA MAISON

LES 2 CAMARADES

ET LA BAGARRE A ECLATE


De gauche à droite : Elodie LEBRAULT, Céline CORNAYRE, Marie-Madeleine GARCIA, Danielle TERRASSON, Sylvie PRUDON, Perrine CUGIER et Cécile LE VAILLANT



*** Seconde partie ***

« Le festival des abominations »


UNE ETUDE APPROFONDIE


De gauche à droite : Philippe PEETERS et Arnaud ALEHAUSE (dans la télé)

LA DEMANDE

LA RENCONTRE DES CLONES


De gauche à droite : Frédérique TROUVAIN, Séverine CHAISE, Arnaud ALEHAUSE, Marie-Laure DAUTREY et Anne-Marie PETIT

A : - Bonjour, je suis Daniil Harms.

B : - Ah! Comme moi! On m'appelle justement Daniil Charms parce que je suis Daniil Harms.

C : - Incroyable, parce que moi justement je signe mes livres avec mon nom d'auteur en ne prenant que mes initiales c'est-à-dire D.H., D.H. comme Daniil Harms !

D : - Usurpateur, je suis le vrai Hharms avec deux 'h' pour mieux vous couper.

E : - Je suis heureux de vous entendre apporter cette nuance, cher monsieur Hharms, car moi mon nom c'est Carl Ivanovitch. Ce nom un peu compliqué me permet de ne pas avoir d'homonymes. Parce que vous voyez, la plupart du temps je souffre de m'appeler Daniil Harms.

F : - Enchanté de vous connaître Daniil Harms, moi je m'appelle Daniil CHarms alias Schardam.

E : - Ah vous aussi, ce n'est pas commun et c'est même plutôt beau.

F : - Ben vous savez, il n'y a pas de hasard, j'aurais dû m'appeler comme tout le monde Daniil Harms. Mais heureusement, j'ai eu cette idée : elle ravit ceux qui ne me connaissent pas !

TOUS : - Là c'est foutu, mon vieux. On te connaît tous aussi bien que si c'était nous-même. D'ailleurs tu es nous.

G : - Ah bon, comme vous m'êtes intimes, à vous je peux dire que mon surnom c'est…

TOUS : - (Coupant la parole) Daniil Harms! Petit plaisantin va ! On sort du même nid !

G : - Non, mon surnom est… Dandan ! Car c'est beaucoup mieux d'avoir un surnom afin que quand quelqu'un d'intime s'adresse au seul et unique Daniil Harms, je sais que c'est moi.

H : - Haarms prend deux "a" au cas où vous ne le sauriez pas, bande de déguisement en série !

TOUS : - Ah bon ? ! Répète !

H : - Non, justement, j'ai horreur des copies. Mais croyez-moi bien que j'en suis désolé surtout que c'est juste par coquetterie.

TOUS : - Petit coquin, va !

I : - A croire que personne ici n'a lu mon extrait d'acte de naissance. Les papiers officiels font de moi le véritable Daniil Harms né Daniil Ivanovitch Iouvatchov. Je vous prierai donc à l'avenir de ne signer aucun de mes écrits personnels à ma place. Merci.

TOUS : - Gros bluffeur va !

I : - Si vous voulez !

J : - En attendant faisons témoigner l'histoire. Au bas de ma première poésie j'ai signé "D.""Ch.". Je suis le Daniil Harms responsable de cela, j'ai moi-même inauguré le début de Daniil Harms dans l'écriture, je suis donc le plus légitime d'entre nous, ne vous en déplaise.

K : - Qui mieux que moi pourra vous parler de l'Ordre Transrationnel d'Aleksandr Toufanov, poète zaoumnik, du Flanc de gauche, du collectif Radix qui augurera des futures obériouty dont je fais partie ? !

TOUS : - Stop ! Merci, on sait !

K : - N'oubliez jamais que ce sont toutes ces anecdotes que je raconte qui nous daniilharmisent le plus ! Sans moi, Daniil Harms, vous ne seriez pas si Daniil Harms !

L : - C'est une usurpation collective, Daniil Harms c'est moi, je le crie haut et fort.

M : - Tout ceci serait vrai si vous le prononciez bien votre nom! En fait on devrait dire (avec une prononciation russe) Daniil Harms comme moi je le dis, puisque je suis le Daniil Harms référent.

N : - Ceci dit, moi, je suis sûr qu'ici en France tout le monde sera sensible au fait qu'on dise Daniel et non Daniil. Tel est donc mon nom. Pardonnez-moi d'être le plus officiel des Daniil Harms !

A (à O) : - Et toi, tu es qui?

O : - Moi ? Moi je suis un Daniil Harms qui vient d'entendre qu'il y avait un Daniil Harms dans le public, et qu'on ne savait pas qui c'était.

PETROV ET MOUSTIK


Arnaud ALEHAUSE

ILLUSION D'OPTIQUE

LA CHUTE


De gauche à droite : Frantz HELLERINGER et Soizic L.


De gauche à droite : Soizic L. et Cyril DRUEZ

UNE AGAPE INATTENDUE


Anne-Marie PETIT

COMMENT UN HOMME SE DISPERSA

TROIS CLOUS DANS LE PIANO

LE CORBEAU A 4 PATTES

LE QUART DE FUMEE


Thierry MORELLI

L'HOMME ROUX

LES MANGEURS DE BETTERAVES


De gauche à droite : Frédérique TROUVAIN, Anne-Marie PETIT et Séverine CHAISE

LE BOEUF BOUILLI


De gauche à droite : Philippe PEETERS, Marie-Laure DAUTREY, Cyril DRUEZ, Séverine CHAISE et Arnaud ALEHAUSE


Marie-Laure DAUTREY

JE SUIS NEE DANS UN ROSEAU


De gauche à droite : Solange PORTE et Frantz HELLERINGER

LE DEBUT DE LA FAIM


Marie-Laure DAUTREY

PIERRE SUR ROUE

LA VIS N'EST PAS UN CLOU

LA FILLE PATROULIOV


De gauche à droite : Soizic L. et Marie-Laure DAUTREY

CECI ET CELA

AN OBSTACLE

LES CHEVALIERS


Thierry MORELLI

UN FAISAN SUR LA NUQUE

LES AFFIRMATIONS


De gauche à droite : Séverine CHAISE, Anne-Marie PETIT, Arnaud ALEHAUSE, Thierry MORELLI, Marie-Laure DAUTREY et Janine NOWAK


Cyril DRUEZ

*** Fin ***

* Spectacle très librement inspiré des écrits de Daniil HARMS, traduction d'Igor Kovalenko
* Mise en scène, adaptation et textes additifs de Régis MOULU
* Scénographie : Angeline LAUNAY (peintures) & Janine NOWAK
* Les costumes ont été réalisés par la troupe et notamment par Janine NOWAK
* Régie lumière : François HARDOUIN
* Accueil public : Murièle et Olivier

Remerciements à la Mairie et au Théâtre de St-Maur qui nous ,a permis l'accès au plateau Radiguet

 

 

Distribution de la première partie : "Petites histoires déboulonnantes"


Avec, par ordre d'apparition :

Anne-Marie SOULIER, petite fille de Daniil Harms, Pétrov, mouche, chef de la milice

Philippe MOY, traducteur, Piotr Mikhailovitch (romantique avec peu de cheveux), anti-hôtes

Cécile LE VAILLANT, traductrice pour sourds et muets, Olga Pétrovna, conteuse de l'histoire d'Abram Démianovitch

Agnès BARBOTTE, Mychine, sœur-siamoise

Danielle TERRASSON, collocatrice, jeune fille, anti-hôtes assistante

Perrine CUGIER, collocatrice, commère

Jean-Pierre HUBERT, milicien, gardien

Céline CORNAYRE, présentatrice, Maricha co-spectatrice de Guilels, commère

Claude WISNIEWSKI, fée, Evdokim Ossipovitch qui est la mère de Koka

Aurélie BOCCARA, cheval qui conte, voix du télégramme

Stéphanie DRIKES, spectatrice de Guilels

Séverine GRIMBERT, observatrice de Nikolaï Serpoukhov

Sylvie PRUDON, Klopov qui a cassé sa montre, Vostriakov à sa fenêtre

Valérie RICHARD, Koka, sœur-siamoise

Marie-Madeleine GARCIA, Bogadielnev le porc

Elodie LEBRAULT, Princesse Kouklov, femme qui se méfie du poivre

 

 

 

 

 

 

 



Le contexte de Daniil Harms

Et pendant qu'Eugène Ionesco propose en France son théâtre de l'absurde (avec par ex. La cantatrice chauve), Daniil Harms use en Russie de mille subterfuges (dont l'absurde) pour pouvoir s'exprimer sans se faire arrêter. Pour prôner la liberté, il lui faut être imaginatif : ses écrits seront donc, sous une fausse naïveté et avec une grande expressivité, pleins de fantaisie et lourds de sens et de symboles. Daniil Harms est donc un fou qui souffre d'un trop-plein de conscience, un "révolutionnaire par nécessité" qui veut s'affranchir de tout, un chercheur "sans fond" et, dans la vie, un provocateur dont le cynisme a valeur d'espoir et de rédemption.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Son écriture déstructurée

Si sa parole est déstructurée, insensée ou même parfois réduite à sa seule phonétique, c'est pour mieux s'affirmer (acte de libération). Donc, "ode au vivant" et "à bas la réalité qui nous oppresse (forme de surréalisme)" semble-t-il nous crier jusqu'au point de lutter contre toute logique. Il est nécessaire et salutaire, à son niveau, de tout faire pour que l'impossible survienne… Le "rêve réaliste" est donc une quête réelle qu'il poursuit.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Note d'intention du metteur en scène

Pour servir une telle pensée, plusieurs de ses textes ont été choisis et montés en scènes dont le lien est souvent thématique. Il n'y a pas d'histoires (car il faut échapper à toute logique) mais des tas de petites histoires qu'il faut "prendre sans comprendre", comme le feraient des enfants. Car c'est un "spectacle à univers, à climats et à ambiances" majoritairement. Là est la vie (dans ce surinvestissement du présent), là est notre possible rêve… qu'on appelle aussi liberté !

 

R. Moulu

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Distribution de la seconde partie :
"Le festival des abominations"

Avec, par ordre d'apparition, à visage découvert :

Philippe PEETERS, docteur, bonze

Arnaud ALEHAUSE, Ermolaïev mangeur de pilule, Moustik le mathématicien

Marie-Laure DAUTREY, celle qui a un maître qui se tait, cliente du Bœuf bouilli

Séverine CHAISE, Pétrov l'amie du mathématicien, lièvre, serveuse

Frédérique TROUVAIN, borgne, grand-mère aux quatre dents

Frantz HELLERINGER, Adam ex-Anton, conteur de l'histoire de l'homme roux, grenouille

Soizic L., Eve ex-Natacha, Irina Mazer qui a des bas (en anglais stockings)

Cyril DRUEZ, Maître Leonardo Da Vinci, chat, Pronine qui aime les bas

Anne-Marie PETIT, serpent, petite fille narrant le corbeau et le renard, lièvre

Thierry MORELLI, l'homme au bonnet de fourrure, cow-boy, conteur de l'histoire des vieilles

Solange PORTE, celle qui est née dans un roseau

Janine NOWAK, conteuse de l'histoire de Pétia Gvozdikov, grande tragédienne, cow-girl


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de R. MOULU


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