Voir le programme, la distribution de la soirée et le tract créé pour l'occasion

Présentation de l'interventions en hommage à Raymond RADIGUET

 

Présence RADIGUET.

aux Ateliers d'Art - Samedi 8 mars 2003

Poésies, dialogues et adaptations poétiques de Régis Moulu

Distribution : Françoise Boisseau & Nathalie Capelle

Commande de la Mairie de St-Maur

 

 

Prologue Radiguet, en provenance de l'autre rive.

 

Nathalie

- Tel Icare des temps modernes,

Le dit "Monsieur Bébé" "fusillé par les soldats de Dieu"

Est venu vous dire que son fantôme vous hantera toujours

Au plus Diable de votre corps défendant.

Si le bonheur est égoïste

Les remords sont un suicide,

Messire Jean a fait de moi une baudruche

Le gros Grasset y a ajouté sa démesure,

Et pourtant je reviens maintenant vous déclarer

Qu'il m'était fort aise d'être

Pris pour votre objet de curiosité,

Je me suis fait un nom avant un livre,

Il est vrai,

Voyez comme mon fantôme

Peut encore vous attirer

Dans le rêve que vous ne réaliserez jamais,

Je ne suis pas un gamin,

Je ne suis pas plus une nouvelle fille,

J'avais un âge que je n'ai jamais atteint,

Et si je vous ai laissé vous servir de mon désir,

C'était pour mieux vous balancer mon impudence,

Avec moi, ce sera toujours la grande crue des sentiments

A chaque fois que la France tardera à ranger ses fusils,

Inondations, inondations, inondations

Jusqu'à mon voyage à Arcachon

Où manquer de se noyer

Fut moins une liberté

Qu'une libération.

Devenu un jeune trop âgé,

Je ne tardai pas à mourir,

Mes pairs m'ayant oublié

Au profit de ma jeunesse buvable,

Revanche tardive, certes,

Mais de quelle honneur me parle-t-on ?

Mal mort, j'attendis donc le jour de mon inhumation pour vous revenir.

Moi je vous dis que ce message vient de lui !

 

 

Adieu à l'adieu.

 

Françoise

- Je me sens mal : j'ai comme jamais

l'impression de m'être mal... restaurée !

" Adieu (Chantant, accompagnée au piano)

Amiral, ne crois pas déchoir

En agitant ton vieux mouchoir

C'est la coutume de chasser

Ainsi les mouches du passé. " Raymond Radiguet

C'est vrai,

il ne faudrait pas oublier

que les vivants

ne sont pas que

de vieux... fruits de mer !

 

 

J'aime Rajki. J'aime Raymond.

 

Nathalie

- Moi, j'aime Rajki... (se reprenant) j'aime Raymond.

Le 18 juin 1903, à 16h50, au 30 bis de l'Avenue du Rocher à Saint-Maur, c'est sûr que j'y étais. Nous étions à sa naissance trois témoins avec une femme cordonnier et un imprimeur.

Je suis le désir.

Ses parents s'appellent Jules Maurice Radiguet et Jeanne Louise Marie Tournier. Simplement je le sais, nous étions si proches, tout comme je sais qu'il était l'aîné de 7 enfants. Impossible dans de telles conditions de me semer, que ce soit au 53 avenue de l'Echo ou au 4 avenue Charles VII à St-Maur.

Dorloté par une Margueritte qui aime les incendies et les cimetières, le voilà bien aimé, bien lancé.

Oh, Rajki, Rajki, Rajki !

Je suis la seule à connaître ce surnom, le pseudo de Raymond ! On s'aime, j'ai vu ses photos. Lui et ses souvenirs, c'est comme pour moi et le fruit de mes recherches : on ne les troquera jamais contre nul autre. Je déteste la petite Carmen. A son égard, la myopie de Rajki est avantageusement cruelle !

Rajki, juste être seule avec lui sur l'île d'Amour, pour son fouillis boisé...

Comment ne pouvais-je pas être morte de passion pour le secrétaire de rédaction du "Rire" ; tout ça ne s'invente pas ! S'il te plaît, mon chaud et froid Rajki, ne sèche plus les langues vivantes ou sinon je serai toute ton école buissonnière ! Comme lui, à 16 ans, j'ai eu "Le Diable au corps", "Les Joues en feu", comme lui, j'aime quelques animaux choisis, je passe du "Coq Parisien" au "Boeuf sur le Toit", fais "Les Pélican" quand je ne suis pas au plus pur de "l'Oeuf Dur". En 1921, il ira même jusqu'à m'appeler "Denise", j'étais comme ses "Devoirs de vacances", rien que cela... Et quand bien même il ne s'en rappellerait pas, qui m'en contredirait, je saurai en parler des heures, car ce n'est pas si loin, 1921, ce n'est pas si loin... On s'est fiancés au "Bal du Comte d'Orgel" plus récemment, en 1922, et,

en 1923,

près du Sénat,

Rajki m'a transmis sa fièvre...

puisqu'à 20 ans en 1923,

l'élu de mon coeur,

Ile de France, Ile d'Amour,

meurt.

Depuis j'ai vingt doigts,

comme pour mieux retenir toutes ses années

partagées.

A deux mains donc,

ce n'est pas trop pour te rejoindre

avec toute ma bouche, de toute cette tombe,

car toi pour moi,

ou typhoïde pour tyroïde,

c'est avec mon théâtre à mots

que je t'écris

que je te crie,

que je t'en crie,

que je t'en prie de là toujours rester

près de moi,

à mes côtés,

à mon devant,

puisqu'il ne me faut plus jamais

avoir la langue trop à l'étroit,

et j'en crie,

j'en crie,

j'en crie.

 

 

Citation à l'ordre du portrait.

 

Françoise

- Soyons objectifs, ma petite, soyons objectifs avec des objectifs subjectifs. Accusons le coup : Raymond Radiguet est enterré parmi nous, et ce n'est pas faute de l'y avoir empêché, écoutez-moi : Françoise, pour Jean Cocteau :

" Soignez-le : la fatigue développerait [en lui] des germes nerveux dont le mystère des lettres est un signe. Il faut que Raymond double le cap d'un âge ingrat qui ne ressemble pas à celui des autres " Jean Cocteau

le plus fou étant que

" quinze jours près de lui me guérissent d'un an à la maison " Jean Cocteau

C'est le monde à l'envers ; terre au ciel et ciel en terre !

Sachez, petite fan, que je l'ai connu moi aussi, mon âge parle pour moi, à votre différence, tandis que vous, c'est votre jeunesse qui vous en rapproche : soignez-vous donc, vous aussi !

... En documentaliste, permettez-moi de vous exposer son histoire labellisée par la vie. Sa patrie c'était la littérature qu'il disait. Vous le saviez ?

Non, bon alors je continue, petite, vous êtes soufflée !

A l'école communale, il était sage, sérieux et médiocre, mais il avait le goût de la lecture, vous le saviez pas plus, hein ?

Non, bon alors je continue, petite, vous êtes déflagrée, quasi implosée !

Pour lire, il s'installait souvent dans une barque qui appartenait à son père, sur la Marne, on aurait dit un coquillage sur une tombe... les spécialistes me comprendront. Mais c'est quand même fortement symbolique, non - pauvre petite fan - alors même que sa famille avait déjà eu son noyé ! Vous ne saviez pas ça aussi ? Non ?

... Bon alors là, je m'arrête, ça suffira pour aujourd'hui CAR QUAND VOUS AUREZ APPRIS CETTE LECON COMMENCERA ENFIN LE DEVOIR DE MEMOIRE. Hommage. Hommage en la présence parmi nous de Raymond Radiguet.

Nathalie

- Non, encore une s'il vous plaît ! Avez-vous au moins quelques images à collectionner ?

Françoise

- Non.

Nathalie

- S'il vous plaît, continuez : ne laissez pas mourir cette mémoire dinosaure qu'il y a en vous.

Françoise (Prise sous la force des révélations)

- La vérité, c'est qu'il roulait des cigarettes avec des feuilles qu'il arrachait d'un petit carnet, votre Rajki !

... Eh ! la fan ! Je ne vous ai pas tout dit, tout à l'heure. Les feuilles qu'il arrachait de son petit carnet pour faire des cigarettes contenaient des poèmes, oui des poèmes.

N'y a-t-il pas plus forte poésie que ses volutes enchanteresses ?

Il n'y a plus de fumée sans Radiguet, au point d'en changer toutes les expressions !

C'était un véritable homme de lettres, voyez-vous, de ces hommes qui travaillent sans que ça se voie !

 

 

Hommage éclairé.

 

Nathalie (En débile, sous le coup de la passion)

- Comme s'il y avait une évidence à lire un fantôme !

Visez ces morceaux choisis que j'ai mis dans mon journal intime. Ce sont les autres qui l'ont encensé, je fonds, je suis fondue, car j'aime Rajki, son surnom est trop chaud !

Goûtez par exemple à ce qu'a dit André Salmon :

" c'est vrai que ses poèmes étaient de belles architectures typographiques. " André Salmon

Françoise

- Mais Rajki, ce n'est pas un nom, ça, au plus un caprice !

Nathalie

- A Prikaz, maintenant :

" il y a je ne sais quoi d'un climat instable de l'inquiétude universelle " Mr Prikaz

Françoise

- Rajki ! et pourquoi pas la froide solitude de Reykjavik, grande fan, va ! Car il faut bien, à un moment, tempérer tous ces poèmes un peu trop chauds ! Je cite :

" des fleurs dans l'entrejambe du caleçon, ce jardin tiède dans la giroflée " Raymond Radiguet

Ce n'est plus tout à fait du diable au corps, ce serait même plutôt une obsession en tête ! Tu trembles, hein ?

Nathalie

- Au tour de Jean Cocteau, l'exclusif !

" il était myope et toute sa personne fragile, sérieuse, absente, semblait nager maladroitement à la traîne de ce regard qu'il approchait des choses. Il feignait de ne pas les voir et les enregistrait une fois pour toutes " Jean Cocteau

Ouh !

Françoise

- Rajki ! Rajki ! Rajki ! Mais ça sonne comme Nijinsky, ça, ce qui fait deux prodigeskis incroyableskis pour Jean Coctoski, non ?

Nathalie

- On a dit aussi de lui que : " c'était un grand jeune homme timide et joufflu, habillé qu'il était d'un veston couleur mastic à pieds-de-poule marrons beaucoup trop vaste pour lui et d'un pantalon de fonctionnaire, à raies " Blaise Cendrars

Excitant ! Raisonnablement excitant !

Avec lui, ma vie est une BD surtout quand

" il sautillait dans sa démarche. On eut dit que les trottoirs lui étaient élastiques " Jean Cocteau

Jean Cocteau !

Françoise

- Rajki, un quasi cousin de Rachmaninov ou même son frère de prodigalité tant qu'on y est ! Ah, jeunesse ennemie !

Nathalie

- Paul Morand : " un Radiguet aux sourcils soudés nous regardait dire et faire des bêtises, les apprenant de sa présence, nous les reprochant par une taciturne arrogance, implacable comme l'enfant juge de ses parents " Paul Morand

" Bon candidat à la cruauté " André Salmon

dira même André Salmon. Alors, serait-ce pervers ? Toujours est-il, selon Camille Aymard, que

" c'était un enfant sans jeunesse, sans exubérance, sans illusions. Il me rappelait ces jeunes lettrés chinois qui, à vingt ans, portent sur leur masque sans âge une impression de vieillesse précoce " Camille Aymard

Moi, il suffit que je m'intéresse à lui pour que je l'aime encore plus ! Mais jusqu'où cela ira-t-il ?

 

 

Radiguet, premier objet publicitaire.

 

Françoise

- Radiguet fut en définitive notre premier objet publicitaire, je le vois bien. Mais quelle image a-t-on de sa jeunesse pour ainsi l'instrumentaliser ? A-t-il de cette manière payé son avance sur tout, cette avance sur son âge, sur sa mort, sur le défi ou sur l'honnêteté à admettre ce que fut la guerre loin du front - un drôle de cocufiage, parfois - ... Je vous rappelle qu'il a eu quand même le prix du Nouveau Monde !

Radiguet

Bon pour une rumeur

En l'humeur

De Bernard Grasset,

Radiguet outsider

Comme un héros masqué,

S'avançant sous le manteau,

Radiguet bonimenté,

Et que sur lui chacun

Garde ses yeux fixés,

Je vous annonce ses meilleures feuilles,

Vous êtes vous aussi triés sur le volet,

Plus précoce que Rimbaud,

Ce nouveau Rimbaud

Qui s'appelle Radiguet,

Il suffit alors du Gaulois

Pour l'amplifier,

Puis Radiguet affiché,

Radiguet placardé

Et Radiguet lancé

Sur les écrans pour la première fois,

Radiguet raillé,

Radiguet qui fait polémiquer,

Mais Radiguet modèle de littérature

Pour les jeunes littérateurs

De sa génération,

Donc Radiguet à jamais vivant

Parmi nous,

Radiguet ressuscité !

 

 

Parole à l'absent qui reparaît.

 

Nathalie

- Il me dit de vous dire,

qu'en tout lieu, toute époque,

parce qu'il a le recul du mort et qu'il n'a jamais été un enfant,

qu'en chaque chose

il y a "Vues sur la mer"...

" VUES SUR LA MER.

Le soleil sommeille

au fond du chapeau de paille

Mêmes initiales

Je n'ai pas le temps

d'attendre la lumière

qui vient au-devant de moi

Adresse inconnue

La vie au grand air

J'entends une autre mer

au fond du coquillage

Tu jouais au ballon sans même te douter

Parfois

Le soleil descend non loin

de la plage." Raymond Radiguet

J'y allonge ensuite ma serviette de brumes matinales, excitée,

car j'aime Rajki - pour moi,

ou j'aime Raymond - pour les autres,

comprenez-moi !

 

 

L'adulte mineur.

 

Nathalie

- Vous ne trouvez pas qu'il ne fait pas assez chaud ?

Françoise

- Qu'avez-vous derrière la tête de votre corps ?

Nathalie

- Chaud !

Françoise

- Show ?

Nathalie

- Enfin, c'est normal que vous ne sentiez rien, vous, vous venez juste de traverser l'ère glacière. Il avait un feu qui vaut pour un défi. "Les Fiancés de Treize ans" de mon Raymond pour mon Raymond, passages choisis.

"[...]

Aiderons-nous Vénus à naître ?

L'oursin du désir se hérisse.

[...]

Sauront nos amours abriter

De la maternelle colère.

[...]

La naïve à qui l'on défend

De mettre un pantalon ouvert.

[...]

Pourpre ciel entrouvert ! Grenade

[...]

En tricycle dans tes domaines

Que la mer Rouge ne te teigne,

La douleur en une grenade

Changeant la naïve châtaigne." Raymond Radiguet

Ha !

Puis "Septentrion, Dieu de l'Amour", de mon Raymond Radiguet, extrait :

"[...]

Tous les cadeaux que distribue

Avec sur les yeux un bandeau

L'enfant qui devrait être dieu

Gracieusement aux danseuses

Ravissent leur coeur et leurs yeux." Raymond Radiguet

Je dois bien avouer que Rajki est un moteur.

Françoise

- Le drame étant de dire encore moteur alors même qu'elle devrait y voir la fin d'un film.

 

 

"Le front comme un drapeau perdu"

 

Françoise

- "Le Front comme un drapeau perdu" de Paul Eluard comme s'il parlait de Rajki, euh, je veux dire Raymond Radiguet quoi ! Excusez ma passion que j'ai mal réglée.

"Le front comme un drapeau perdu

Je te traîne quand je suis seul

Dans des rues froides

Des chambres noires

En criant misère

Je ne veux pas les lâcher

Tes mains claires et compliquées

Nés dans le miroir clos des miennes

Tout le reste est parfait

Tout le reste est encore plus inutile

Que la vie

Creuse la terre sous ton ombre

Une nappe d'eau près des seins

Où se noyer Comme une pierre." Paul Eluard

 

 

La petite histoire d'une histoire brève !

 

Françoise

- Car on eut entendu à l'époque qu'on prît en compte Radiguet pour ne pas faire de peine à Cocteau.

Pour Raymond, le plus dur était bien d'être enfin Radiguet lui-même. Ainsi il ferait preuve d'une certaine conscience.

S'écrire

comme pour se livrer,

se lever

comme pour se libérer,

par conséquent révéler

la vie par sa vie,

toucher à l'essentiel

par le sexuel

à fleurir

en prenant toujours et encore

tout le monde de vitesse.

Y-a-t-il

ici

a fortiori

tromperie ?

Car au menu, se lisait déjà un "Diable au corps" qui, pour contrevenir à la guerre, proposait la sève de la jeunesse... comme pour mieux lui-même s'affranchir de ses vieillots protecteurs, ce qui fut tache facile pour qui rencontre la belle et désirable Bronia. Visez-la, cette femme est bien belle, et savez-vous que c'est elle-même qui est venue séduire Raymond Radiguet ? Que se le disent, que se le disent tous ceux qui l'ont pris pour un objet fait homme !

 

 

Le traité d'indépendance.

 

Nathalie

- Il me dit de vous dire une nouvelle chose qu'il a fini de rédiger : son traité d'indépendance. A travers moi, il vous le lit, et ça fait :

Je suis un jeune romancier

à succès,

je bois énormément,

j'ai maintenant vingt ans

et beaucoup de nuits blanches

accumulées

dans une purée

d'opium, je fête mon indépendan-

ce

financière et une fin de non plus goûter

au traité

de tendresse

de mon Jean.

 

 

Salives en puits.

 

Françoise

- Et Max Jacob,

Pour la bonne bouche,

D'ajouter

Qu'il lui a donné

La salive de son puits,

Solennel,

Aux eaux mêlées :

" Le devoir réglait les passions humaines,

mais la honte retient le troupeau dans sa laine,"

plus loin,

"l'Enfer !! Les béquillards et leurs bras en écharpe,

les animaux qui n'ont que des faux-pas,

enchaînés, déchaînés, faisaient des sauts de carpe.

Contemplez l'harmonie des choses,

le monde était pour toi, Raymond, plein de valeur !

et ton siège en plein ciel, à de telles hauteurs !

Tu transformais nos vies en vérités célestes

dans l'air doux et froid.

Tu veillais sans un mot ! sans un geste !

Que tes frères les anges ne s'éloignent pas de toi.

Tu montes jusqu'aux ciels où tu vécus toujours.

Tu vécus de l'Esprit et c'est lui qui t'accueille

sur de pâles buissons de fleurs vives et de feuilles.

O calme amour des lettres ! Amour !" Max Jacob

Nathalie

- " Mon cher Max... J'ai bien tardé à t'écrire [...] quand on prend l'habitude d'écrire beaucoup, et que cela devient moins difficile qu'une lettre à l'ami le plus cher, on hésite avant de priver la postérité d'un poème. [...] Pardon pour ces niaises excuses " Raymond Radiguet

 

 

L'avant-fin.

 

Françoise

- Puis ce fut l'avant-fin.

Premier avertissement qui risqua bien d'être le dernier.

Nathalie

- A Arcachon,

je faillis me noyer sous une barque. Maintenant

j'ai des colères sans raison, sans raison,

je classe, je range, j'ordonne

et passe pour le sorcier de la contrariété

comme si j'aurais pu savoir

que j'allais bientôt mourir,

mais j'ai l'histoire pour moi.

A présent net,

j'anticipe à vingt ans

mon livre qui se ferme

comme si mes yeux

étaient sur moi,

et mon ventre se resserre,

et je désire la messe

en mangeant du chapon-fin !

Françoise

- Deuxième avertissement : Alcool qui me dépense !

Nathalie

- Alcool, qui me dépense,

et moi aussi qui me dépense de la sorte,

c'est à dire inconsidérablement,

faisan Carême

faisan Carême

heureusement que je griffonne par là même

des poèmes

sans compter.

Ecrire ou inviter,

tel est mon nouveau programme

pour peu que ne s'y intercale

une scène de Cocteau

qu'il me faut affronter -les deux-,

Bronia, à l'heure si proche

d'une mère-patrie qui vient me réclamer

alors que Jean la Crème

me fait comprendre

que tout son investissement,

j'en ai fait un crime...

Face à tant d'altérations,

je dus

plus que jamais

et de plus en plus

me miser

sur l'inertie.

Françoise

- Dernier avertissement suivi de sa mort, il aura été pourtant bien averti.

... Il y eut le suicide au revolver de Philippe Daudet après celui de son ami Emmanuel Faÿ.

Nathalie

- Au cimetière il fait froid, non, plus exactement j'ai froid aussi ; de toutes façons, ce sont des obsèques... pour le mort et aussi pour certains vivants, en suis-je ?

Françoise

- Toujours est-il qu'ici naquit

Nathalie

- ma fièvre typhoïde,

hors délire,

je puis surtout dire

que "fusillé je serai

demain

par les soldats de Dieu" !

Dans de telles conditions,

comment pourrait-on

encore dire

que Jean Cocteau ait pu me créer ?

Tout comme pour cette fièvre,

serai-je à vie, même après ma mort,

mal diagnostiqué ?

Enfin, sachez qu'on est seul devant sa mort

tout comme je fus seul devant ma mort.

De quelle nature est ma contagion ?

Fut-elle de qualité ?

 

 

La fin, un bon début.

 

Françoise

- Avertissement public :

Veuillez noter ces quelques points en rapport avec le scandale par répercussion qu'occasionna la mort de notre Raymond :

* Cocteau déjà desséché, donc Cocteau sans pleurs ;

* Il est mort seul à la clinique ; la ronde de ses amis était bien incomplète lors de l'enterrement : Où êtes-vous partis Jean Cocteau, Jean Hugo ? Valentine Hugo malade ? Georges Auric et Francis Poulenc à Monte Carlo, Max Jacob pleurétique ? Jacques Doucet malade ?

Vous seriez-vous enfuis de vous-mêmes faute d'avoir été trop proches ?

*- Son père Maurice Radiguet dans l'obligation de continuer à faire ses caricatures pour faire rire ;

* Frères et soeurs en pleurs, vous rendez-vous compte, à partir de l'âge de 10 ans ;

* Encore à ce stade, on peut encore se demander quelle fut la place de la réclame dans tout ça ! Contestation, contestation, d'autant plus qu'on eut comme le sentiment d'une injustice ;

* Pourquoi fallut-il que ce fut Coco Chanel qui paya les frais de la clinique ? La beauté doit-elle se mêler de la réparation ?

Françoise et Nathalie

- Finalement Radiguet, on se l'approprie,

au pire le loue

à l'instar de tout

ce qu'il avait bien pu sonder

de sa bouche ambiguë !

 

 

"Avec la mort tu te maries."

 

Françoise

- Parole au détenu de la terre, Raymond Radiguet, extrait de "Avec la mort tu te maries" :

Nathalie

- [...]

Les morts que l'on attendait pas

Devant le ciel font les cent pas

Et leurs âmes sont feuilles mortes

Jouets du vent, des quatre vents.

[...]

Parce qu'au ciel on garde l'âge

Que l'on avait en arrivant,

Narcisse se donne la mort [...]. Raymond Radiguet

Françoise

- Auquel se rajoutent les bons mots en sur titrage de Cocteau :

" je lui ai quand même donné la manie des inconvenances en échange de la manie de la mort " Jean Cocteau

ce qui n'a pas totalement marché, vraisemblablement, puisqu'il n'y a pas plus grande inconvenance que la mort !

FIN DE LA REAPPARITION !

C'est avec plaisir et volonté de partage que ce texte se retrouve accessible. Mais toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle de la présente publication, faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée. Avant toute représentation, il est conseillé de demander à Régis Moulu son autorisation et selon les enjeux, de s'informer sur les droits d'auteurs envisageables (utiliser le menu "contact").

 

Dans cette colonne,

25 PHOTOS DU SPECTACLE

prises par Jean-François SANS,

photographe professionnel

j.sans@tiscali.fr

 

De gauche à droite : Jacqueline Moralès et Jean-Bernard Thonus (équipe municipale de St-Maur)

 

 

 

 

 

 

Nathalie Capelle

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Françoise Boisseau et Nathalie Capelle

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Marielle Boucher et Murielle MOREAU (cachée)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Françoise Boisseau et Anne-Marie Darras

 

 

 

 

 

 

 

 

Nathalie Capelle

 

 

Nathalie Capelle

 

 

 

 

 

 

 

 

Nathalie Capelle et Françoise Boisseau

 

 

 

 

 

 

 

 

Nathalie Capelle

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nathalie Capelle

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Adrien Ballon et Magali Benini

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Minh Quyên Pham

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

François Bernard, Sylvain Therond, un tourneur de pages, Magali Benini (piano), John Lepoultier, Alain-David Valckenaere et Cécile Clouet

 

François Bernard et Sylvain Theron

 

Cécile Clouet, Alain-David Valckenaere (basson), François Bernard (flûte), John Lepoultier (cor) et Sylvain Therond (clarinette)

 

François Bernard, Sylvain Therond, Magali Benini, John Lepoultier, Alain-David Valckenaere (caché) et Cécile Clouet

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Christel Sequalino

 

 

 

Nathalie Capelle

 

 

 

 

formation autour de Clément Duthoit

De gauche à droite : Magali benini (piano), Adrien Ballon, Christel Sequalino, Minh Quyên Pham, Cécile Clouet et Raphaël Marais (contrebasse)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Françoise Boisseau et Nathalie Capelle

 

 

 

 

L'ensemble des intervenants (musiciens et comédiennes)

 

Anne-Marie Darras (pianiste et coordinatrice des moments musicaux)

 

Régis Moulu (auteur du texte Présence Radiguet et des adaptations poétiques)

 

Important

Ce travail d'écriture, d'adaptations, de compilation et de citations des relations de Raymond Radiguet est un hommage a l'homme et au phénomène qu'il suscita. Une recherche documentaire a été réalisée ; elle se base sur de nombreux écrits de Raymond Radiguet lui-même et d'article de presse (exemple : Jérôme Garcin), et plus particulièrement sur le formidable travail de Monique Nemer (livre intitulé "Raymond Radiguet") qui a présidé à toute cette écriture. Et si cette création convoque parfois des façons de voir sélectives et orientées, c'est pour mieux souligner l'aspect romanesque et théâtral de cette histoire qui par là même en est intéressante, le sentiment valant pour une mémoire et non pas pour un écart d'intention, une intention toute acquise à la cause d'avoir à rendre honnêtement hommage à Raymond Radiguet. RM

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