SAMEDI 3 février
2024
dans le cadre du Nouveau cycle Animation : Régis MOULU Thème : Le plus de force, de justesse ou d'élégance Bon,
eh bien il va s'agir de sublimer nos écrits. En effet, leur donner
force, justesse et élégance va nous inviter à sortir
de nos habitudes, du convenu, de nos facilités expressives, en
somme de tout ce qui est "passe-partout", insipide ou invisible.
Cette finesse recouvrée grâce à notre volonté
appuyée apporte dès lors précision et concision,
de quoi mieux marquer les esprits, de quoi partager qualitativement des
idées qui retrouvent toutes leurs valeurs. Aussi, c'est à
cette exploration que nous nous sommes livrés, tels "des gourmets
du verbe". Remarque
: au-delà de la contrainte formelle
(thème), le sujet suivant a été énoncé en début de
séance : Écrire un texte dont le personnage principal va vivre un instant
unique : tout ce qui va lui apparaître sera de nature à marquer fortement,
durablement et qualitativement sa mémoire (ciblons de préférence - mais
ce n'est pas obligé - les effets que peut produire une rencontre). De
plus, cela lui inspirera quelques réflexions raffinées. |
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Ci-après
quelques textes produits durant la séance, notamment (dans l'ordre):
"Le voisin" de Claudine CARPENTER
Cela fait déjà trois semaines que je suis installée dans mon appartement. J'ai mes tableaux au mur, mes épices dans la cuisine et mes visites hebdomadaires chez Truffaut font que ma véranda est de plus en plus fleurie. Je me sens bien, surtout que je viens de rencontrer quelqu'une, quelqu'une qui est charmante. Elle s'appelle Mathilde et est un mélange de garçon manqué et de fille fille que je trouve craquant. En plus, elle trouve mon chat adorable, c'est très bon signe. Elle ne connait pas encore ma fille, c'est encore trop tôt. Mais, je m'emballe à penser à mes amours, ce soir je suis avec la puce et nous préparons un dîner. On sonne. Je vais ouvrir. Encore lui ! Il a un grand sourire. " Bonsoir John ! Comment allez-vous ? " " Bonsoir, je sors du boulot, je travaille à une pâtisserie, je vous ai pris quelques bonbons, c'est pour vous et votre fille. " Une chanson de Brel commence à me trotter dans la tête : " Je vous ai apporté des bonbons… ". Seigneur, que je suis mauvaise ! " Parce que les bonbons c'est tellement bon "…. Je regarde le paquet de pâtes de fruits qu'il m'a apportées et lui fais un grand sourire " Même si les fleurs c'est plus praiiiii…sentable ". " Merci ! Merci beaucoup ! La petite va être contente, elle adore les pâtes de fruits. " En réalité, comme tous les enfants de sa génération, ma fille est accro au coca et aux bonbons Haribo, mais je ne vais pas lui dire. Je renifle, encore cette mauvaise odeur. Il doit y avoir de l'humidité dans la cave. " De rien, vous savez, ils allaient les jeter et ça ne coute rien. " Tu l'as dit… elles sont périmées mais comme on dit, c'est l'intention qui compte et malgré la maladresse, cela reste un geste gentil. Je le remercie encore et vais fermer la porte. Il m'arrête d'un geste. " Oui, Ciro, il faut que vous le sachiez, votre véranda… elle est illégale. Elle a été construite illégalement. " Je le regarde, les yeux comme des soucoupes. " Que voulez-vous dire John ? Je suis passée par un notaire pour mon achat, une véranda de 20m2 illégale, je pense qu'il aurait vu, non ? En plus je crois qu'elle a été votée en AG. Attendez un instant… " Je pousse la porte, je vais dans ma chambre et je ressors le titre de propriété et je l'ouvre à la bonne page. " Regardez John, la véranda à été construite en 2003, et votée en AG en 2005, plus de 10 ans avant mon achat ! Elle n'est pas du tout illégale. " Il regarde le papier et à un petit rire. " Vous avez vos papiers mais je vous assure qu'elle est illégale. Ne vous en faites pas, ça se passe bien entre nous alors il n'y a pas de problème. " Perplexe, je le remercie pour les pâtes de fruits et je referme la porte. Mais quel relou ce type ! Ma chérie à rencontré la puce, elle est venue diner et elle va dormir sur le canapé. Il est un peu tôt pour tout dire à ma fille, c'est une amie, c'est tout. On ne se touche pas, on ne se regarde pas, on ne s'embrasse pas. Par contre, nous sortons les poubelles ensemble histoire de s'embrasser discrètement sous le porche en riant comme des ados. De vraies gamines. Elle va revenir diner demain soir. Je remplis ma poubelle autant que possible histoire de devoir la ressortir ce soir. J'ai hâte ! On sonne. Qui est-ce ? Je regarde par le judas. Encore le voisin ! J'ouvre. Il faut rester polie. " Bonjour John ! Vous allez bien ? " " Oui, est-ce que je peux rentrer un instant ? " " Euh… oui, rentrez cinq minutes parce que je m'apprêtais à sortir, j'ai un rendez-vous " Il rentre et prend un air gêné. " Alors voilà, votre amie… " " Oui, mon amie Mathilde, je vous l'ai présentée l'autre jour qu'y a-t-il ? " " Euh…je sais que c'est votre petite amie. " " Ah ? Mais comment le savez-vous ? " Je n'ai aucune envie de nier quoi que ce soit, je ne fais rien de mal et ce qui m'intéresse est de savoir d'où il a tiré cette information assez personnelle. " De rien, de rien… j'ai juste vu qu'elle vient souvent et comment elle vous regarde. " Wow ! Et moi qui pensais avoir un gaydar hyper performant ! Trop balèze le type ! " Enfin, heureusement l'homosexualité à été dépénalisée en France il y a plus de 20 ans. Ce sera tout ? " " Euh… Votre fille le sait ? " Non pas encore, mais il vaut mieux que je le dise à la miss assez rapidement, histoire qu'elle ne l'apprenne pas de ce type. " Ma fille sait ce qu'elle a besoin de savoir, ni plus, ni moins. Ce sera tout, Monsieur Planay ? " " Ne le prenez pas mal… s'il vous plaît " " Mais non, je vous en prie. Je suis désolée mais je dois sortir. " Je me lève et lui ouvre la porte. Il sort. Je commence à me poser des questions. Avril ; le soleil brille, mes amours vont bien, très bien. Ma fille se plait dans le nouvel appartement. Le chat est allongé dehors, il a l'air heureux. Mon ami Ali est venu m'aider à sortir mes meubles de jardin pour que je les mette dans la cour. Je lui ai promis mon curry aux pois chiches légendaire. On parle dans la cour en sirotant une limonade au soleil. " Dis, Ciro, tu sais qu'il y a des caméras de sécurité dans les parties communes, sous le porche ? Je le dis parce qu'elles ne sont pas signalées par une affiche comme elles devraient l'être. " " Non, je ne savais pas. Montre-moi. " Nous allons sous le porche et il me montre le boitier des caméras. Une des caméras est braquée sur ma porte d'entrée. Ce n'était pas le gaydar, il nous filmait le saligaud ! Entre la nausée et la colère, mon cœur balance. Je souris à mon ami. Je le remercie et je me demande ce que je dois faire. Dès le départ d'Ali, je vais frapper à la porte de John. Il ouvre. Je connais maintenant l'origine de la mauvaise odeur qui me prend à la gorge tellement elle est forte. " Monsieur Plantay, j'espère que vous allez bien. Je me permets de venir vous voir car on m'a fait remarquer qu'il y a des caméras dans les zones communes. Savez-vous ce qu'il en est ? " " Ah oui, tout à fait. C'est pour notre sécurité à tous. Les images ne sont pas gardées. " " Normalement, les caméras dans une copropriété doivent être signalées par un panneau, je ne vois rien. " " Si elles sont signalées, Madame, elles perdent tout intérêt. " Euh… Je redescends, je ne sais vraiment pas quoi faire. Il n'a pas l'air méchant. Il n'est vraiment pas futé mais il n'a pas l'air méchant. Un soir de mai, on prend l'apéro dans la cour avec
ma chérie. Ça fait longtemps qu'on ne se cache plus. Mon téléphone se
met à vibrer. Je regarde l'écran. Encore le voisin. " Monsieur Plantay,
comment allez-vous ? " " Bonjour, euh… euh… Je voulais vous demander
quelque chose. " " Je vous en prie. " " Alors voilà, je voulais savoir
si vous vouliez sortir diner avec moi un soir. " " Oh ! Je vous remercie
pour l'invitation mais ce ne sera pas possible. " " Ah, désolé de vous
avoir dérangé. " " Je vous en prie monsieur. " Je lève les yeux. Mathilde
me regarde, le teint blanc, le visage exorbité de colère. |
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Les textes présentés ci-dessus sont sous la responsabilité de leur auteur. Ils sont quasiment le fruit brut qui a été cueilli en fin de séance... sans filet ! |