SAMEDI 7 Mai 2005, de 10h à 18h
Animation : Régis MOULU.
Auteurs invités : Patrice CAZELLES, poète, & Henri GRUVMAN.
Thème : La bambouseraie reposera ton intimité végétale... Les Jardins d'Ombre et Lumière, ce sont 1300 m2 de plantations (dont 50 espèces de bambous) au coeur de La Varenne St-Hilaire (quartier de St-Maur, au 9 Rue Lafayette) ; chacun ressentira dans cet havre de paix la possibilité de laisser son intérieur "communier" avec les plantations, ou quand le petit a l'ambition du plus grand...
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en savoir plus sur ce lieu -que l'on remercie de nous accueillir- avec : www.lesjardinsdombre.com |
-"Bam et Bou, les deux psychologues... en herbe ! " de Janine NOWAK - "La bambouseraie du devenir..." d'Angeline LAUNAY - "Foi de bambou, coeur de Printemps" de Régis MOULU - "Vert Cathédrale" de Françoise MORILLON - "Intime bambou" de Patrice CAZELLES
"Ode à Viinu*" de Bénédicte MOLLIER Je repose dans mon intimité végétale * Viinu est le terme sanscrit de bambou et Mambu signifie aussi bambou en Malais.
"Bam et Bou, les deux psychologues... en herbe ! " de Janine NOWAK BOU : dis-moi, Bam, je parie que c'est samedi, aujourd'hui
? Une femme arrive. Elle chemine posément, calmement,
à petits pas. Elle avise une grosse pierre ronde, coincée entre le pied
d'un arbre et une marche d'escalier. Elle s'y assoit. Devant elle, une
ravissante jarre, un peu comme celles qui sont conçues à Anduze, s'offre
à ses regards. La boutique Zen, qu'elle vient de visiter, est juste
derrière. Elle écoute le carillon qui tintinnabule doucement, agité
par le vent. Elle ferme les yeux ; elle se dit que la musique des anges
ne peut pas être plus mélodieuse. BOU : Regarde, Bam ! Voilà notre vieux couple d'amoureux, Ling et Chang. Je les trouve adorables. J'aimerais assez que ce soient eux qui nous emportent. La femme risque un œil. Elle voit arriver, se tenant par la main, un couple charmant ; ils sont âgés, petits et menus. Ce sont des Asiatiques. Lui est très vieux, tout parcheminé. Un sourire flotte sur le visage de la vieille dame, un visage si doux, si harmonieux. Elle semble glisser sur le sol, tant elle est frêle et légère. En passant, elle caresse les feuilles des bambous. Son mari la regarde, émerveillé, insatiable de sa présence. Ils ont déjà fait un tel chemin ensemble ! Ils ont traversé de si nombreuses épreuves. La vie ne les a pas épargnés, mais ils ont su faire front, résister dans la tourmente grâce à leur amour absolu l'un pour l'autre. Et les voici à présent, apaisés et heureux ; cette promenade hebdomadaire est chaque fois un grand moment d'émotion. Inconsciemment, ils sont en quête d'images de leur passé. Ils retrouvent dans cette végétation qui fut celle de leur enfance, les senteurs d'antan ; ils parviennent à capturer une atmosphère qui fut celle d'autrefois. Ils s'éloignent, poursuivant dans ce cadre exceptionnel, leur parcours bucolique. BOU : Décidemment, ils sont fascinants tous les deux.
Hé, Bam, regarde, regarde : voici la " chantonneuse " ! Arrive une grande femme. Elle serait belle si elle
n'avait cet air un peu égaré qu'ont les gens qui semblent vivre sur
une autre planète. Et en effet, ses lèvres bougent ; une chanson nous
parvient : BOU (triomphant) : Qu'est-ce que je te disais ! Le Bois de Chaville, le muguet ! C'est d'actualité en plus, le muguet. Ah, on rencontre de drôles de phénomènes chez les humains, tu ne trouves pas ? Tiens, à propos de phénomènes, voici le " poète maudit ". Chic, on va encore bien s'amuser. Un jeune homme longiligne, famélique, vient s'asseoir
à même le sol ; ses yeux, aux ardentes prunelles semblent dévorer tout
ce qu'ils regardent. Il tient un livre à la main. Il y jette un regard
farouche, semble fasciné par une phrase ; il la murmure cette phrase,
plusieurs fois, rien que pour lui ; puis il se dresse d'un bond, et
les bras levés vers le ciel, il la clame : " La beauté est dans le regard,
bien plus que dans l'objet lui-même ". Ah que c'est beau !!! Comme il
devait être amoureux celui qui a écrit cette merveille !!! Et il s'éloigne,
heureux de sa trouvaille, le visage soudain illuminé, tout guilleret.
BOU : Un jour j'ai entendu un passant déclarer que la
musique adoucissait les mœurs. C'est peut-être vrai, après tout, ce
n'est pas moi qui vais contester. Mais souvent je me demande si nous
n'avons pas ce même pouvoir. Qu'en penses-tu ? La femme a ri et bougé. Les arbres se sont tus. Il
est temps pour elle de partir. Elle avance vers la sortie. Intriguée,
elle se penche sur une fontaine d'où une sorte de fumée ou de vapeur
s'échappe. Serait-ce une source d'eau bouillante, comme celle de Chaudes-Aigues,
en Auvergne, qui jaillit à 80° ? Mais non, c'est juste un genre de feu
de bengale. C'est joli. L'idée est bonne et apporte un agrément supplémentaire.
Elle ramasse une pierre grise, si douce au toucher. Elle aimerait l'emporter,
mais n'ose le faire. Et puis Henri Méphistophélès passe par là, lui
dit qu'après tout pourquoi pas … Et hop, dans la poche, le galet ! Elle
adresse un geste d'adieu au Bouddha placide qui semble veiller sur ce
haut lieu de la spiritualité.
"La bambouseraie du devenir" d'Angeline LAUNAY Parmi les frémissements des feuillages je me retrouve. Le chant des bambous s'insinue dans mon esprit. J'apprends que le mot " bambou " vient du malais " mambu " - bambou du malais mambu - ce qui signifie " bois indispensable "… aussi indispensable que l'air qu'on respire ?... Alors j'aspire l'air et hume le parfum nommé " Bambou ", l'odeur du jour, et je plonge mon calame dans l'encre naturellement si verte. A même le sol, est posée une petite fontaine d'où s'échappe de la fumée. Tout vit, tout palpite, tout murmure. Et l'univers s'en amuse, l'univers des bambous rend fou, nous transforme, fait que nous sommes " nous ", parfois faute de pouvoir le devenir. Etre, exister, devenir, quoi de plus… Le reste semble superflu… super flûte… J'imagine que je perce quelques trous dans le chaume et que je souffle dans chaque petit trou pour trouver la note inattendue. Des sons doux et pénétrants se mêlent aux rythmes chaloupés des hautes tiges, ondoient et se répandent dans la chevelure aux mèches effilées mollement décoiffées par une brise plutôt fraîche. Je lève la tête. Est-ce que je suis ? - Oui. Est-ce que j'existe ? - Oui. Que vais-je devenir ? -Je ne le sais pas. Sont-ce vraiment des questions ? Faut-il en rire ? Rions-en puisque d'après le chinois, le bambou se plie de rire, et que l'idéogramme qui figure le bambou ressemble à celui du rire. Alors je ris tout doucement, sans secouer la cage… C'est difficile de rire sans renverser sa tasse de thé… thé des moines, des tigres, thé des amants, des enfants, thé des songes de sable, thé Genmaicha… J'ai le choix entre 36 prénoms ; je choisis celui de
Genmaicha que je ne connaissais pas. Je me découvre en Genmaicha. Je
me cherche en Genmaicha. Prononcer trois fois le nom pour ouvrir les
trois portes : celle de la conscience, celle de la conscience et celle
de la conscience. L'endroit semble propice à la méditation. Un pavillon
de bois, lové dans son écrin de verdure assiste au défilé des saisons
mais pour lui, c'est l'éternel printemps, la prime jeunesse, le vert
permanent, ineffable, ineffaçable… La bâtisse s'agrémente d'un ponton
sur le présent duquel je me situe et d'où je contemple le jardin du
" tout à l'heure " et d'où, si l'envie m'en prenait, je pourrais encore
distinguer un passé qui semble vouloir se dissimuler dans l'obscurité.
Un faisceau de cannes se dresse contre le mur. Je caresse leur surface
lisse, patinée au vent impalpable. Comme ce dernier, la pensée ne se
laisse pas emprisonner et donc si j'existe, puis-je devenir alors que
je ne parviens que difficilement à être… Cela semble pourtant simple…
Il suffit de se pencher sur l'humilité légendaire du bambou et d'expérimenter
sa non moins légendaire solidité… Un coup de vent soudain fait s'envoler nos feuilles blanches qui se sont couvertes de phrases. Je me précipite sur les mots de Benjamin et sur les miens qui ont suivi le mouvement… Courir après les idées, rattraper le fil de ses pensées, se tromper de couloir, égarer ses esprits dans les feuillages à cause des verts si différents : les tendres, les profonds, les mélancoliques, les proches ou les lointains… Ils possèdent des vertus apaisantes : le " baume du bambou " reste à inventer, une pommade moins Véronèse que céladon à appliquer sur toute surface irritée, un baume universel contre les blessures chroniques. " Déjà mon courage s'affermit "… Où ai-je entendu cela ? - Dans le tube creux d'une sarbacane… Où ai-je vu cela ? - Sur la collerette d'un nuage qui se fond avec la végétation… Un sceptre de bambou… Une fleur de Genmaicha…
"Foi de bambou, coeur de printemps" de Régis MOULU, auteur animateur Droit droit droit, Lierre, lierre, lierre, Bam bam bam, bou bou bou, Et puis, en couverture du tout, oui oui oui, je me sens bien, je n'ai pas le vertige, foi de bambou, cœur de printemps, je détache une feuille, c'est une plume vivante, déboulant sur l'à-peu-près d'une coiffure de quelques bambous naines, je subodore qu'elles viennent de se lever, ces petites boulottes, ah, on est bien, oui on est bien, c'est si important qu'on puisse partager des instants uniques, comme ça, entre deux poussées, moi je vais mieux, mais comment aborder ce gros chignon alangui, enguimauvé, vert de naïveté, qu'à cela n tienne, je me lance à l'eau en crachant ces quelques mots : alors moi : " euh, bonjour ! " ... rien ! bon, bah, c'est qu'on est bien… Moi : " euh, c'est bien ici : on ne se lève jamais avant qu'on se lève, il faut bien le dire, quel bonheur, n'est-ce pas ? … surtout pour vous, question tag's ? " … rien ! sans doute parce qu'on se sentait toujours bien. Et moi de rajouter pour raboter le silence : " si vous
voulez un coup de peigne, enfin je veux dire un coup de main pour un
coup de peigne, on peut faire ces deux coups en un coup, qu'en pensez-vous
? " … et c'est juste à ce moment très très précis que… rien ne se
produisit, bref, on était bien, indéniablement, indéfiniment. Moi : " si vous voulez, le collectif de bambous naines,
je vous enlève vos étiquettes de prix, ça vous permettra de ne pas vous
lever pour rien, je sais ce que c'est que de se lever comme on allait
être vendu et puis se rendre compte en fin de journée qu'on a été nonchalant
pour rien puisque invendus. Alors, vous répondez, pouilleuses, avant
même que les mouches renoncent à vous tourner autour ? Vous n'avez même
pas de fleur dans les cheveux. Têtes creuses, même sans être à Tahiti,
il faudra que vous sachiez que ça se fait. Alors, chair à panier, vous
ne voulez toujours pas causer ? " Eh oui, j'étais bien obligé de
les provoquer. mon intimité, enfant végétal côté mère et enfant stupéfait côté face. Un faire-part, un faire-part : je n'avais plus que ce papier en bouche, cette pâte en tête. Je pris alors une sardine fanée qui reposait au fond du ciel, m'assurai de sa platitude, m'armai d'un pinceau en tige de bambou véritable et écrivis à tous que je n'avais plus de soucis et que j'allais bien partout où je serai bien, ah, comme il est bien de se sentir bien !
"Vert Cathédrale" de Françoise MORILLON Mes yeux clignotent. Avril : la nature s'est réveillée, en Mai elle s'est installée puis elle grandit tout au long de ces jours, joli mois de mai, comme il est dit ; la nature éclate, un bouquet de feu d'artifice, mêlée de camélias, de magnolias, de rhododendrons, de pensées aux mille tons exacerbés, de violas toutes couleurs, d'impatiens, de tomates cerises et cerises encore anémiées ; et la vie animale à deux pattes, hérissons, tortues vivantes ; en granit, canards en faïence, canards vivants, et les oiseaux, féerie des mirlitons, des chants aigus, des colibris, cri rauque des corbeaux ; tout s'éveille au printemps en une danse colorée. Ce n'est donc pas le jour de l'intimité végétale ordonnée par notre Maître ! Une forêt tropicale comme aux Antilles, je ne le pense pas. Je marche dans un chemin ombragé de graminées hautes aux tiges souples qui se balancent, le vent doux ce matin se marie très justement avec ces espèces qu'on nomme les bambous. Le calme, je m'en gorge, je respire profondément, je prends un second bol de sérénité ; je me sens bien. Cette végétation bambouesque forme un couronne autour de moi, me couvre de sa chlorophylle, elle m' inonde de bien-être, je me sens ressourcée et j'ai envie de distribuer ce bonheur mais aussi de le freiner pour en respirer le cœur, le cœur du bonheur simple : quelques centaines de bambous se balancent au-dessus de ma tête et ce moment délicieux passé au milieu de ces végétaux m'apporte une telle paix que j'ai dû mal à y croire ; point n'est donc besoin de faire des dizaines de milliers de kilomètres pour rencontrer cet instant ? Ces bambous sécurisent mon Moi : fragilité apparente contre solidité ; la musicalité s'écoute, cet orchestre organisé et composé de ces mille pattes vertes se met en route, les bambous araignées se tiennent à carreaux devant le Maître vent ; puis soudain ce dernier ordonne, à gauche les violons, au fond la flûte déchaînée, à droite les violoncelles, les contrebasses se taisent encore, puis la musique exulte, tout ce univers se croise, s'exprime, s'agite dans une paix étonnante : intimité végétale oui, je la respire, elle me pénètre. Les bambous ne se relookent pas, lifting ne connaissent pas : éternelle jeunesse, éternelle vieillesse se rejoignent, âge ne connaissent pas, jamais malades, toujours verts, joyeux carillonneurs et en même temps humbles, charmants, communiquant la sérénité et le charme. Mes yeux se ferment sous la gloriette Bambousie, les lignes se confondent sous ma plume qui imite les bambous en se pliant mollement, mes doigts la lâchent et s'endorment.
"Intime bambou" de Patrice CAZELLES, poète invité JE SUIS ETANT Je vais, je viens entre tes reins… SOUDAIN Selon que le bambou procède par reptations verticales en direction du ciel écarte ses feuilles comme des mains dissipatrices sur ton corps Bambi : Bambi parce que tu avais ces yeux là DU BOUDDHA (Hauteur : 60 cm, prix : 519 € soit env. 3
404 Fr.) COMME MOI LA GAULE EN ACTION MUETTE |
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